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L’enseignement de l’économie à l’université

1 mars 2014

université - MorelLe site Économie autrement a été créé en 2008 dans la foulée de la déclaration Pour une autre vision de l’économie, déclaration à lire sans faute si ce n’est pas déjà fait. Très actif à ses débuts, ce site ne publie plus de textes que de façon épisodique. Par exemple, aucun texte n’a été publié entre octobre 2013 et février 2014. C’est triste.. Par contre, la fournée du 23 février fut intéressante.

Je vais ici commenter un des textes publié ce jour-là, soit L’enseignement de l’économie à l’université : les limites de la pensée unique de Sylvie Morel. Il s’agit en fait de la reproduction d’un diaporama (genre document PowerPoint) datant de novembre 2013.

Le document

L’auteure observe que, un peu partout dans le monde, l’enseignement de l’économie est de plus en plus limité à la seule vision dominante du courant néoclassique, dit orthodoxe, malgré l’échec patent de ce courant à expliquer le fonctionnement réel de l’économie, comme nous l’a montré éloquemment son incapacité à prévenir la dernière crise et à analyser ses causes. Et ce courant a continué à démontrer sa non pertinence avec l’imposition de mesures d’austérité désastreuses qui n’ont réussi qu’à l’aggraver.

Elle mentionne ensuite une série de gestes posés, surtout en Europe, mais aussi au Québec, autant par des groupes d’économistes que par le mouvement étudiant, pour dénoncer la pensée unique en économie, pensée qui en plus ne s’observe pas dans le monde réel. Ils dénoncent aussi bien les «mondes imaginaires» au centre de l’économie orthodoxe que son usage «incontrôlé des mathématiques» dans un domaine qui traite des comportements humains, impossibles à réduire en quelques équations. Ils ne nient pas que les mathématiques sont utiles pour mieux comprendre le fonctionnement de l’économie, mais refusent qu’un outil soit transformé en finalité.

Elle termine ce texte en présentant les courants hétérodoxes dans lesquels elle est le plus impliquée, soit l’institutionnalisme et l’économie féministe. J’ai d’ailleurs déjà présenté la vision de Mme Morel à ce sujet dans un précédent billet.

Et alors…

Ce texte est intéressant, notamment par sa présentation de la diversité des courants en économie et par la dénonciation du fait qu’un seul est enseigné. Même Keynes, selon moi et bien d’autres le plus grand économiste du XXème siècle, n’est pas enseigné dans toutes les universités. J’aurais toutefois aimé que ce texte aborde davantage la situation au Québec. Je ne sais en effet pas à quel point cette situation se vit aussi dans nos universités. Mais, je sais qu’un de mes garçons a eu récemment un cours sur l’économie de l’environnement dans lequel on abordait ce sujet avec des équations néoclassiques…

Et, ce phénomène à des conséquences énormes. Non seulement on a réduit l’enseignement de l’économie à son courant néoclassique, mais on a convaincu une grande partie de la population, et même de la gauche, qu’il n’existe qu’une seule économie, celle-là! Combien de fois ne lit-on pas, et pas seulement de la part de journalistes de droite, mais aussi de gauchistes qui écrivent dans des forums de discussions que «les économistes pensent que…», comme si tous les économistes pensaient de la même façon et qu’il n’y avait qu’une seule théorie économique. Cette réduction de l’économie à un seul courant de droite a aussi pour conséquence d’éloigner de cette discipline les personnes avec des affinités de gauche et même de leur enlever le goût de s’y intéresser. Et, paradoxalement, cela est bien la plus grande victoire de la véritable propagande de la droite…

9 commentaires leave one →
  1. Raphaël Erkoréka permalink
    1 mars 2014 11 h 07 min

    Peut-être voudriez-vus entrer en contact avec monsieur Bernard Élie, afin de donner un second souffle à ce site, qui le mérite bien.

    Raphaël Erkoréka.

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  2. 1 mars 2014 12 h 02 min

    J’ai déjà communiqué avec lui quelques fois. Mais, comme je ne peux rien apporter à ce site, je ne saurais pas trop quoi lui dire…

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  3. 4 mars 2014 11 h 14 min

    La lecture d’Économix m’a été d’un grand secours pour comprendre cela! 🙂

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  4. 4 mars 2014 13 h 57 min

    À comprendre quoi, exactement? Les conséquences de l’enseignement de l’économie limité à un seul courant? Est-ce là que j’ai lu que les départements d’éducation sont souvent financés par des riches de la droite? Je sais avoir lu ça quelque part, mais ne me souviens plus où…

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  5. Richard Langelier permalink
    5 mars 2014 17 h 43 min

    « Même Keynes, selon moi et bien d’autres le plus grand économiste du XXème siècle, n’est pas enseigné dans toutes les universités ».

    J’ai bien aimé le texte de Dilles Dostaler et Frédéric Hanin sur la réception de l’oeuvre de Keynes au Canada et au Québec http://classiques.uqac.ca/contemporains/dostaler_gilles/keynes_au_quebec_qc/Keynes_au_Quebec.pdf . Ayant subi un cours d’Émile Bouvier au collégial et de multiples entrevues de François-Albert Angers à Radio-Canada, je me suis bien bidonné à partir de la page 20, particulièrement à la page 25, note 38 : « Jacques Parizeau rapporte que lors de la rentrée universitaire, lorsqu’il était étudiant aux HEC, le directeur de l’établissement lisait les directives papales dans lesquelles il était mentionné que l’étude de la pensée keynésienne était proscrite par l’Église catholique (entrevue du il (sic), décembre 2004) ».

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  6. 5 mars 2014 20 h 27 min

    «il était mentionné que l’étude de la pensée keynésienne était proscrite par l’Église catholique»

    J’a lu ce texte il y a quelques années, mais je ne me souvenais plus de cette anecdote!

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  7. 15 février 2015 12 h 37 min

    Une conférence de Syvie Morel sur le sujet :

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