La santé et le système nordique
Quand j’ai décidé de lire Le bon sens à la scandinave – Politiques et inégalités sociales de santé, de Marie-France Raynault et Dominique Côté (avec la collaboration de Sébastien Chartrand), ce n’était surtout pas en raison de son titre! D’une part, ceux et celles qui me lisent depuis longtemps savent que j’ai horreur de l’expression «bon sens» et de ses variantes. D’autre part, les auteurs nous avertissent dès le début que ce livre porte en fait sur le système nordique, qui comprend la Finlande, un pays non scandinave (je ne le savais pas). Bref, le titre de ce livre est trompeur dans tous ses aspects. Ce n’est donc pas le titre qui m’a poussé à le lire (pas plus que les dents de la dame mises de l’avant sur la couverture…), mais bien deux articles, soit celui-ci (cadenassé) paru dans Le Devoir, et celui-là paru dans La Presse. Mais, ne nous laissons pas distraire par le choix du titre de ce livre, choix souvent imposé aux auteurs par les éditeurs.
Le contenu
Ce livre nous présente de façon très claire et bien organisée la raison d’être du système nordique, ses origines et ses caractéristiques. Comme il est très dense, il m’est impossible de le résumer. Je vais plutôt simplement mentionner les sujets qu’il aborde.
Pour bien mettre la table, le livre commence en illustrant les inégalités sociales de santé, soit par exemple les écarts de l’espérance de vie, des problèmes de santé mentale et de mortalité infantile selon les quartiers, les professions et le revenu. Ce chapitre ne se contente pas de montrer des corrélations, mais fait part des résultats des recherches qui expliquent ces observations et suggère quelques pistes de solution, sujet plus profondément développé dans le chapitre suivant.
On présente par la suite une série de données qui montrent que les pays nordiques, soit la Norvège, la Suède, la Finlande et le Danemark, se classent depuis des décennies dans les premiers rangs mondiaux dans la plupart des indicateurs ayant un lien avec la santé : pauvreté, pauvreté des enfants, inégalités, développement durable, etc.
La suite du livre présente en détail les initiatives prises dans ces pays qui expliquent leurs excellents résultats. C’est vraiment le cœur du livre. On y décrit et explique les politiques adoptées par chacun de ces pays pour favoriser la santé publique, les principes sur lesquels ils reposent et leur évolution. On aborde entre autres les sujets suivants :
- transferts sociaux;
- équité entre les sexes;
- soutien à l’emploi;
- concertation et démocratie décentralisée;
- recherche sociosanitaire;
- syndicalisation;
- mode de scrutin proportionnel;
- politiques familiales et de conciliation famille-travail;
- aide au logement;
- éducation;
- services de garde;
- inclusion sociale;
- environnement;
- services de santé (facteur qui est loin d’être le plus important en matière de santé publique, contrairement à ce qu’on tente souvent de nous faire croire).
Ces sujets sont tous présentés de façon systématique, passant des objectifs, au processus d’adoption, à l’implantation, à l’évaluation (et aux correctifs, lorsque nécessaire) et aux points à retenir pour nous.
Après ces présentations la plupart du temps élogieuses, les auteures consacrent un chapitre aux critiques de ces politiques, chapitre que j’espérais! On y aborde entre autres la question du léger virage à droite des dernières années, les difficultés d’intégration des immigrants (surtout en Suède, pays nordique qui en reçoit le plus) et la hausse récente de la vulnérabilité de certaines populations (surtout les jeunes, les immigrants et les familles mono-parentales). Le livre se termine par une conclusion dans laquelle les auteures résument les principales leçons que le Québec peut retenir du système nordique.
Et alors…
Et alors, lire ou ne pas lire? Ce livre m’a impressionné par la grande qualité de l’analyse des politiques socioéconomiques des pays nordiques et par la construction systématique de la présentation. On n’est pas ici dans la promotion biaisée d’un système, mais dans une analyse approfondie de ses points forts et de ses points faibles. Il s’adonne seulement que les points forts sont beaucoup plus nombreux (et importants) que ses points faibles!
Alors, oui, il faut lire ce livre si on veut l’heure juste sur ce système trop souvent récupéré et dénaturé…
Dans un article que j’ai lu, de mémoire, la part du privé dans la santé en Suède est de 27%, 2 à 3% de moins qu’au Canada qui en principe est universel! La différence est qu’en Suède, la part du privé est extrêmement réglementé… contrairement au Canada.
Dans un autre article, la Suède, partant du principe souvent avancé par le privé qu’il coûte moins chère que le public, établit les prix du privé selon les coûts des actes au public. (De plus, il est interdit d’avoir recours a des frais indirects comme les frais d’inscriptions, d’abonnement, de buanderie, etc…)
Ça freiné quelque peu le privé en Suède!
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Ça serait intéressant que tu retrouves les sources…
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Plutôt que de me lancer dans les basses flatteries : «Excellent billet, Darwin!», je m’épivarderai en associations libres.
Le billet de Josée Blanchette me brasse la cage dans tous les sens http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/410772/les-aiguilles-et-le-folfox . La mise au point sur ses chiffres (9h12) est importante.
J’ai vérifié. Depuis que j’ai 65 ans, je n’ai plus droit à la gratuité des soins dentaires, optométriques, orthèses. Il existe cependant un programme de déficit médicaments http://www.mess.gouv.qc.ca/telecharger.asp?fichier=/publications/pdf/SR_f_sr2171.pdf . Au mois de mai, j’ai eu une infiltration dans la hanche non opérée. J’ai payé 340$ pour changer ma prescription à la pharmacie (l’infiltration a été faite en radiologie, parce qu’il y a peu d’espace pour passer l’aiguille ou qu’il y a un nerf, je suppose). J’ai revu l’orthopédiste un mois plus tard comme il me l’avait demandé.
– Oui, il y a soulagement. Le hic, c’est que l’effet des infiltrations que vous me faites, chaque année, dans les genoux s’est estompé. Il me faudrait donc une prescription et 3 rendez-vous à une semaine d’intervalle.
– Nous l’avons maintenant ici. On va vous le remettre au local x et revenez dans cette cabine.
C’était 430$ par genou en une seule seringue.
– C’est impossible, l’an passé, j’ai payé 225$ par genou pour 3 seringues.
– Ça me surprendrait, il n’y a pas de profit ici.
– De toute façon, je vais passer prendre ma carte chez nous. Laissez-moi la prescription, je vérifierai en passant.
À la pharmacie, c’était 480$. Bizarre, verser 3 fois 2 ml dans une seringue, c’est plus de travail que verser 6 ml dans une seringue. [1]
Finalement, j’ai acheté la grosse seringue à l’hôpital. Le hic, c’est que j’ai une carte-débit et qu’on ne prend que les cartes crédit à l’hôpital. Les locaux du CHUM sont vétustes, mais on est à fine pointe de la technologie. Par chance, il y a un guichet automatique dans l’hôpital. Comme c’est une autre institution financière, j’ai versé 3$ pour le premier retrait maximal de 500$ et 3$ pour le second retrait. Heureusement, mon institution ne m’a facturé que 1,5$ par transaction en plus.
Inutile de vous dire que la seule insertion dans chaque genou les a rendus plus raides que lors des années précédentes, mais aujourd’hui, c’est mieux.
J’ai le goût d’enchaîner sur la réaction de Lyne Bessette http://www.ledevoir.com/sports/actualites-sportives/410637/l-affaire-jeanson-revient-hanter-bessette-les-athletes-dopes-ne-payent-pas-leur-du-dit-la-championne-lyne-bessette . Je ne doute pas que mon trip pour la marathon populaire (1h30 par jour sur les trottoirs) ait causé l’usure du cartilage de mes genoux et que le cartilage des hanches ait compensé. Le Bon Dieu, l’évolution ou le hasard nous ont fait passer de la course à 4 pattes à celle à 2 pattes. Cette pression existait dans le populaire :
– Quel temps t’as fait?
– T’as déjà fait mieux! Qu’est-ce qui se passe?
Si je donnais une réponse, c’était inlassablement : «on sait ben, toé, Langelier, tu reviens toujours avec ta maudite tendinite!».
Si le programme de déficit médicaments (provincial) me rembourse, tout ira bien pour moi, un peu moins pour l’ensemble de la société québécoise.
[1] Dans mon temps, une grosse bière c’était 22 onces et moins cher que 2 petites contenant 12 onces chacune. C’est «rough» pour un imitateur de Marx, dernier des ricardiens, disait Schumpeter.
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Tu prends ça bien… en tout cas, dans ton texte! Je compatis…
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J’ai pris un brake pour manger mon dessert.
J’ai assisté à des conférences-midi à http://www.omiss.ca/ . Marie-France Raynault et Richard Lessard avaient été mandatés par le gouvernement péquiste dans le cadre du «projet de loi 112 pour contrer la pauvreté et l’exclusion sociale» pour voir le «modèle» suédois. Une autre chercheure, avec le même mandat nous avait fait un résumé d’une étude sur un groupe de mères monoparentales dans un quartier pauvre d’une ville américaine, qui avaient eu le droit de recevoir leurs prestations de sécurité du revenu, pendant x semaines, même si elles trouvaient un emploi. Elle nous a dit qu’en acceptant de faire la recherche, elle s’engageait à ne pas publier les résultats pendant une année.
Pendant la période de questions, un de mes amis a exprimé son désarroi : «Pourquoi ne pas tout publier et permettre que les débats se fassent en toute transparence?»
Marie-France Raynault lui a dit qu’il pouvait écrire au MESS. Cet ami l’a fait et m’a transféré le patinage de réponse qu’il a reçu.
Je suis prudent sur les corrélations qu’on peut faire en sciences sociales. On ne peut pas isoler les variables sous cloche comme en physique newtonienne. Je reprends l’exemple donné par Claire Durand dans un manuel de méthodes quantitatives en sciences sociales : il y a eu augmentation des ventes de magnétoscopes et des cas de SIDA entre 1980 et 2000. Il serait aberrant de chercher un lien de causalité. Je ne nie pas l’intérêt sur la recherche de prévalence de certaines maladies dans les quartiers défavorisés et des probabilités moindres pour les enfants d’accéder aux études supérieures. Je ne vois surtout pas comme solution les clubs de petits déjeuners «payés» par la fondation Chagnon ni les oeuvres de charité de Lise Watier http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/411099/maquillage .
Je ne prends surtout pas bien que le MESS puisse décider qu’il ne publie pas les résultats d’une étude d’un chercheur qu’il a embauché. Ça m’intéresse de savoir que dans l’État de Sarah Palin, il y a un revenu de citoyenneté…. comme redistribution des revenus du pétrole. Le débat démocratique devrait se faire avec le plus d’informations possible. Un jour peut-être, la démocratie remplira ses promesses.
Il me semble que la conclusion manque: «surtout, soyez toujours de bonne, de bonne humeur» sur http://gauterdo.com/ref/jj/joyeux.troubadours.html . Mon vieux cerveau doit en perdre des bouts déjà!
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«Je ne prends surtout pas bien que le MESS puisse décider qu’il ne publie pas les résultats d’une étude d’un chercheur qu’il a embauché.»
En effet! Et pourquoi attendent-ils avant de publier?
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