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Le commerce international de marchandises

10 juillet 2014

imports-exportsJe dis souvent de la série cansim de Statistique Canada contient des trésors qu’on découvre souvent à petite dose… Par contre, elle m’a joué des tours avec ses données incompatibles sur le commerce international… Mais, il y a une solution de rechange qui m’a été gentiment signalée par Renaud Gignac et Ianik Marcil, la Banque de données des statistiques officielles sur le Québec (BDSO). C’est donc grâce à ces données que j’ai pu reprendre ce billet…

Solde commercial

Le graphique qui suit montre l’évolution du solde commercial international de marchandises (ligne bleue avec l’échelle de gauche, tiré des données sur le commerce international de la BDSO) ainsi que celle de la valeur du dollar canadien par rapport au dollar des États-Unis (ligne rouge avec l’échelle de droite, selon les données de la Banque du Canada).

imports-exports1

On peut constater que le Québec a connu un surplus commercial de 1993 à 2004, quand la valeur du dollar canadien était inférieur à 0,80 $ des États-Unis et qu’il n’a connu que des déficits lorsque la valeur du dollar canadien était supérieur à cette somme. En fait la relation entre la valeur du dollar canadien par rapport au dollar des États-Unis et le solde commercial de marchandises est tellement forte que le coefficient de corrélation entre ces deux facteurs atteint -0,94, ce qui est énorme. Attention, cela ne veut pas dire que la valeur du dollar canadien est le seul facteur qui explique l’évolution du solde commercial international de marchandises. Pensons par exemple à la forte augmentation de la concurrence des pays à bas salaires (surtout de la Chine qui a joint l’Organisation mondiale du commerce à la fin de 2001). De même, la baisse de la valeur du dollar canadien en 2012 et 2013 n’a pas fait diminuer ce déficit commercial. Par contre, les données des cinq premiers mois de 2014 montrent une baisse de ce déficit par rapport aux mêmes mois de 2013 avec un dollar encore plus bas (0,94 $ au moment d’écrire ce texte)… D’ailleurs, la hausse étonnante du PIB du Québec au cours du premier trimestre de 2014 (0,6 %, soit l’équivalent de 2,4 % sur une base annuelle) «provient principalement d’une amélioration du solde du commerce extérieur, tandis que les dépenses des ménages stagnent et que l’investissement en capital fixe est en baisse un deuxième trimestre consécutif», selon l’Institut de la statistique du Québec (voir page 7).

Bref, ces données confirment ce que je dis depuis des années, que le Québec paie très cher son appartenance à un état pétrolier qui voit la valeur de sa monnaie varier au gré du prix du baril de pétrole

Gains et pertes

Le tableau qui suit montre l’évolution du solde total commercial international de marchandises total (première ligne) et celui des principaux types de marchandises exportés et importés par le Québec entre ses surplus (2001) et déficit (2013) les plus élevés des 25 dernières années (et probablement de tous les temps).

imports-exports2

La colonne «2013» nous permet de constater que le solde négatif de 17,7 milliards $ du pétrole et de l’essence représente 77,6 % du déficit total de 22,8 milliards $ cette année-là. Si on ajoute le déficit de 8,9 milliards $ du solde des «Voitures particulières» et des «Camions légers, fourgonnettes et VUS», on s’aperçoit que ces quatre catégories de dépenses sont déficitaires de 26,6 milliards $ et que, sans ces déficits, le solde commercial international de marchandises du Québec aurait été positif cette année-là de 3,8 milliards$! Cela nous permet de constater à quel point notre amour du transport individuel est coûteux pour le Québec (en plus de l’être pour la qualité de son environnement).

La colonne «Écart» nous montre que les trois catégories de produits qui ont le plus contribué à la détérioration de notre déficit (12,5 milliards $ sur près de 31 milliards $, soit plus de 40 % de celui-ci) sont aussi associés au transport individuel. Le tableau nous montre aussi que le surplus commercial d’un des fleurons historiques de l’industrie québécoise, le secteur du papier journal, a vu fondre son surplus commercial de près de 65 %, passant de plus de 4 milliards $ en 2001 à moins de 1,5 milliard $ en 2013. Même notre industrie phare, celle des aéronefs, a vu son surplus diminuer de 30 %, contribuant à plus de 2 milliards $ de la baisse. Non indiqué dans le tableau, il est bon de souligner que le secteur du bois d’oeuvre a aussi perdu des plumes, son surplus passant de 1,8 milliard $ à guère plus de 760 millions $, en raison du contentieux sur le bois d’œuvre entre le Canada et les États-Unis (entre 2001 et 2006, principalement), puis de l’effondrement de l’industrie de la construction aux États-Unis à compter de 2008. 

Les seules consolations notables se situent du côté du secteur des Minerais et concentrés de fer, dont le solde a augmenté 1,3 milliards $ (quoique l’exportation de matière première non transformée n’est pas vraiment une bonne nouvelle), et de l’Aluminium et alliages d’aluminium sous forme brute qui profite amplement des tarifs d’électricité que nous octroyons gentiment à cette industrie. Bref, même les consolations ont un goût amer…

Et alors…

Les données présentées dans ce billet permettent de constater à quel point la politique pétrolière canadienne (appuyée par les gouvernements péquistes et libéraux), en plus de détruire l’environnement et de permettre l’émission de quantités phénoménales de gaz à effet de serre, nuit à l’économie du Québec. Sans un changement de politique (et de politiciens!), il ne faut pas espérer que cette situation change de façon significative à l’avenir. Mais, justement, il y aura une élection fédérale l’an prochain… profitons-en!

5 commentaires leave one →
  1. Boileau permalink
    10 juillet 2014 7 h 07 min

    Une démonstration qui mérite une large diffusion, Mais les gouvernements Harper et Couillard feront sûrement la sourde oreille.

    Aimé par 2 personnes

  2. Maxime Leroux permalink
    12 juillet 2014 13 h 41 min

    Il ne faudrait pas oublier le différentiel de taux d’intérêt. Pendant que le taux US restait bas après 2001 jusqu’en 2005, celui du Canada augmentait tranquillement durant la même période.

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  3. 12 juillet 2014 16 h 29 min

    À http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/tend/CAN/fr/FR.INR.RINR.html et http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/tend/USA/fr/FR.INR.RINR.html, on ne voit pas du tout ce que vous dites, mais des taux canadiens réels plus faibles entre 2000 et 2005.

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  4. Maxime Leroux permalink
    13 juillet 2014 13 h 15 min

    Dans les modèles PTI ce ne sont pas les taux réel qui importe si je ne m’abuse. Les taux des banques centrales vont avoir un impact sur les autres taux qui par la suite va avoir un impact sur l’inflation et le taux de change.

    Dun autre côté, il n’y a pas que les monnaie  » d’État pétrolier » qui se sont appréciées par rapport au usd sur la même période, même si ces dernières ont connu une plus forte appréciation.

    Il ne faudrait pas oublier le dollars canadien comme valeur refuge non plus.

    Bref oui le compte courant est fortement relié au taux de change (crois pas que ce soit contesté par quiconque). Mais les changements de taux de change eux proviennent de bien des facteurs; les prix du pétrole en autres.

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  5. 13 juillet 2014 16 h 38 min

    Dans d’autres billets, j’ai cité diverses études qui attribuaient entre 35 % et 60 % (environ, j’y vais de mémoire) du changement du taux de change États-Unis/Canada au pétrole.

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