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Le collège classique pour garçons

23 février 2015

collège classique«Les différentes contributions qui composent l’ouvrage cherchent à revisiter la représentation monolithique du collège classique qui a cours encore» peut-on lire en quatrième de couverture et sur la page Internet du livre Le collège classique pour garçons, Études historiques sur une institution québécoise disparue de Louise Bienvenue, Ollivier Hubert et Christine Hudon.

J’ai eu beau lire ce livre et même relire l’introduction, je ne sais toujours pas qu’elle est cette «représentation monolithique» des collèges classiques. Maisons de formation pour assurer la relève des prêtres? Ghettos dorés pour isoler l’élite de demain de celle de la plèbe et pour assurer la reproduction sociale? Gardiens de la langue et de la formation humaniste? Manifestations du contrôle par le clergé d’un mode d’éducation désuet, rigoriste et sexiste? Tout cela à la fois?

Promettant un regard contrasté sur cette institution dont le dernier établissement a cessé ce type d’enseignement il y a plus de 45 ans (en 1969), les 15 textes réunis (16 avec l’épilogue) dans ce recueil (car il s’agit bien d’un recueil de textes, même si cela n’est pas mentionné dans le résumé de la page Internet, tous les textes de ce livre ayant déjà été publiés auparavant, même si parfois remaniés) ne portent que sur cinq collèges, dont aucun de jésuites, l’ordre religieux pourtant à l’origine de cet enseignement au Québec, et sont tous écrits par les trois auteurs (avec la participation d’un quatrième dans un seul cas). En outre, comme chaque texte est indépendant des autres, on y observe de très nombreuses répétitions.

Le contenu

Les 15 textes réunis dans ce livre abordent leur sujet d’étude sous de très nombreux angles. Les auteurs les ont regroupés en quatre grandes catégories :

1. Les collèges québécois étaient-ils vraiment classiques et élitistes?

  • un exemple de collège (et c’était loin d’être le seul) où les cours commerciaux attiraient davantage d’élèves que les cours classiques de la fin du XIXème siècle jusqu’à la fin des années 1930;
  • un autre collège où seule une faible minorité des élèves du cours classique le terminait (là, on est dans la première moitié du XIXème siècle…);
  • présentation d’un débat sur la tradition des collèges classiques vers 1920;
  • les collèges classiques et leurs liens avec la bourgeoisie canadienne-française.

2. Vue de l’intérieur des collèges

  • des lieux fermés sociologiquement (accessibles uniquement à la bourgeoisie), et physiquement (on n’y entrait pas et n’en sortait pas facilement), mais pas autant qu’on le prétend;
  • les pensionnats aux XVIIIème et XIXème siècles : règlements, discipline, etc.;
  • les enseignants (formation, âge, conditions de vie, relations avec les collégiens, etc.);
  • le travail des sœurs, main-d’œuvre à bon marché au service de ces messieurs, main-d’œuvre qu’on doit tenir loin des jeunes mâles des collèges (un des textes que j’ai préférés)…

3. La construction du masculin

  • la socialisation masculine : sévérité et transgression (ou le défi d’enfreindre les règles sans se faire mettre dehors), un milieu uniquement masculin, l’importance de la religion pour être un homme complet, etc.
  • la promiscuité masculine et l’ambiguïté des amitiés;
  • les femmes (absentes ou presque des collèges), la vision qui en est transmise et la sexualité;
  • les sports et l’activité physique dans les collèges.

4. Représentations et mémoires des collèges

  • la représentation des collèges dans leur publicité (de la promotion de la nature entourant les collèges au contenu de la formation qui y est offerte);
  • les réunions d’anciens (en fait, ce texte présente en détail, et très en détail, une seule de ces réunions);
  • l’image des collégiens dans les romans (en fait, dans trois romans).

L’épilogue : ce dernier texte présente divers témoignages et opinions contemporaines sur les collèges classiques. Nostalgiques dans bien des cas, les opinions présentées ici sont tout de même variées, passant de la dénonciation de cette formation élitiste et rigoriste, à l’apologie de l’éducation humaniste et de l’apprentissage du latin et du grec, racines de la langue française. Même si ce texte est un de ceux que j’ai le plus appréciés, j’ai ressenti un certain malaise, car les opinions portaient sur les collèges, souvent jésuites et avec des collégiens uniquement externes, des dernières années de leur existence (années 1940 à 1960), alors que les textes précédents du livre portaient beaucoup plus sur des pensionnaires et des collèges non jésuites du XIXème siècle. Cela dit, il est vrai que le débat sur le mérite de la formation classique revient encore de temps en temps dans l’actualité. Dans ce sens, ce texte est pertinent.

Et alors…

Alors, lire ou ne pas lire? Ça dépend… Je suis personnellement un peu déçu, car j’espérais une présentation plus systématique de la réalité des collèges classiques. Or, ce livre, comme mentionné auparavant, se concentre sur uniquement cinq collèges en fonction, si j’ai bien compris, de la disponibilité des sources, sans savoir si ce qu’on y raconte est vraiment représentatif de l’ensemble des collèges (si une telle représentativité est possible). On s’y attarde souvent sur des aspects anecdotiques (reposant entre autres sur des journaux personnels) sans qu’on puisse savoir, encore une fois, si ces tranches de vie sont vraiment représentatives.

Par contre, le livre couvre un large éventail des sujets d’intérêt, de la vie des élèves à celle des enseignants, en passant par la formation qui y était donnée et par la présence et l’exploitation des sœurs qui accomplissaient les tâches les plus ingrates pour une fraction du coût que les collèges auraient payé à des employéEs laïques. Une personne intéressée par ce genre de questions y trouvera certainement son compte!

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2 commentaires leave one →
  1. Lise gingras permalink
    20 mars 2015 20 h 27 min

    Bonjour, j’ai adoré vous écouter « a la page »

    Tout s’explique dans les comportements des étudiants maintenant adultes.
    J ai eu deux frères plus vieux que moi, qui ont fait le cours classique,aujourd hui comme depuis trop longtemps, ils sont dans leur monde de tête,de pouvoir…dommage pour la famille,relation homme- femme.

    Merci,ce fut un très beau moment que je communique à mes 3 sœurs qui apprécieront aussi j’en suis certaine.

    Nous allons nous procurer le livre.

    Lise.

    J’aime

  2. 21 mars 2015 0 h 37 min

    Je ne comprends pas vraiment votre commentaire. Que veut dire « j’ai adoré vous écouter « a la page »»?

    J’ai moi-même fait quatre ans de cours classique, et je ne me reconnais pas du tout dans la description que vous faites de vos frères. Je pense que tout dépend du contexte…

    J’aime

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