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Le marché du travail des femmes (12) – la diplomation

25 juin 2015

mt_femmesCe douzième billet de ma série sur le marché du travail des femmes porte sur la diplomation. Pour ce, j’utiliserai le tableau cansim 282-0209 tiré des données de l’Enquête sur la population active (EPA).

Pour la population âgée de 25 à 54 ans

Dans ce genre de sujet, je préfère toujours, comme bien des analystes, utiliser la population des personnes âgées de 25 à 54 ans, car cela permet d’éviter les effets dus aux changements démographiques, que ce soit du côté des jeunes (15 à 24 ans) ou de celui des personnes âgées de 55 ans et plus. Le graphique qui suit semble bien trop chargé, mais comme les évolutions sont bien graduelles et pas du tout chaotique, on peut y observer des tendances bien nettes, et même différencier leur ampleur chez les femmes et les hommes. On remarquera que ce graphique commence en 1990, plutôt qu’en 1976, en 1987 ou en 1997 comme d’autres graphiques présentés dans les billets précédents. Cela est dû au fait que Statistique Canada a modifié en 1990 les catégories qu’elle présente sur ce sujet. Les données antérieures existent, mais ne sont pas comparables (les données étaient compilées en fonction des années d’études plutôt qu’en fonction de l’obtention de diplômes).

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– Personnes ayant moins d’un diplôme d’études secondaires (DES) : La proportion de la population âgée de 25 à 54 ans ayant moins d’un DES a littéralement fondu entre 1990 et 2014. Chez les hommes (ligne bleue foncée), elle est passée de 32,6 % en 1990 à 13,4 % en 2014, une baisse de 18 points de pourcentage ou de près de 60 %. Chez les femmes (ligne rouge), elle a diminué encore plus, passant de 33,3 % en 1990 à seulement 9,5 %, une baisse de 24 points de pourcentage ou de plus de 70 %. Quoique déjà spectaculaire, cette amélioration aurait été encore plus renversante si on avait pu obtenir des données à partir de 1976.

– Personnes ayant un DES : La proportion de la population âgée de 25 à 54 ans ayant un DES a aussi diminué entre 1990 et 2014, mais beaucoup moins. Chez les hommes (ligne jaune), elle est passée de 18,2 % à 14,6 %, une baisse de 3,6 points de pourcentage ou de près de 20 %. Chez les femmes (ligne verte), elle est passé d’un niveau nettement plus élevé que celui des hommes, soit de 23,9 %, à un niveau légèrement inférieur, soit 12,5 %, une baisse de 11,4 points de pourcentage (baisse trois fois plus importante que celle des hommes) ou de 48 %.

– Personnes ayant poursuivi leurs études après avoir obtenu un DES, mais sans obtenir un diplôme de niveau supérieur : Je n’ai pas présenté les données de cette catégorie. Il y a des limites à surcharger un graphique! Disons simplement que l’importance relative de cette catégorie a diminué de façon semblable chez les hommes et les femmes, soit d’un peu plus de deux points de pourcentage, de 5,7 % à 3,4 % environ.

– Personnes ayant un diplôme d’études postsecondaires (surtout un DEP ou un DEC) : Il s’agit de l’évolution des catégories présentées dans le graphique qui est la plus semblable chez les femmes (ligne rouge vin avec une flèche, la plus haute à partir de 1993) et chez les hommes (ligne bleue pâle avec une flèche inversée, également la plus haute à partir de 1993). Chez les femmes, la proportion de la population âgée de 25 à 54 ans ayant un diplôme d’études postsecondaires est passée de 28,3 % en 1990 à 42,9 % en 2014, une hausse de 15 points de pourcentage ou de 52 %. Chez les hommes, cette proportion est passée de 25,8 % en 1990 à 42,6 % en 2014, une hausse de 17 points de pourcentage ou de 66 %.

– Personnes ayant un baccalauréat : La proportion de la population âgée de 25 à 54 ans ayant un baccalauréat (mais pas de diplôme supérieur) a augmenté considérablement entre 1990 et 2014. Chez les hommes (ligne noire avec des flèches opposées), elle est passée de 10,2 % en 1990 à 17,7 % en 2014, une hausse de 7,5 points de pourcentage ou de près de 75 %. Chez les femmes (ligne vert pâle avec un genre de sablier), elle a augmenté beaucoup plus fortement, passant de 8,5 % en 1990 à 23,0 %, une hausse de 14,5 points de pourcentage ou de 170 %. Inférieure à celle des hommes de près de deux points en 1990, la proportion de femmes dans cette catégorie a dépassé celle des hommes pour de bon en 1999 et l’écart entre les deux s’est creusé par la suite pour atteindre en 2014 plus de 6 points, avec un niveau plus élevé que celui des hommes de 30 %.

– Personnes ayant un diplôme supérieur au baccalauréat : La proportion de la population âgée de 25 à 54 ans ayant un diplôme supérieur au baccalauréat a aussi augmenté considérablement entre 1990 et 2014. Chez les hommes (ligne mauve avec un cercle), elle est passée de 5,1 % en 1990 à 7,9 % en 2014, une hausse de près de trois points de pourcentage ou de plus de 55 %. Chez les femmes (ligne orange avec une croix), elle a augmenté encore plus, passant de seulement 2,8 % en 1990 à 9,0 %, une hausse de six points de pourcentage ou de 220 %! Près de deux fois moins élevée que celle des hommes en 1990, la proportion de femmes dans cette catégorie a dépassé celle des hommes récemment, soit en 2012, avec un écart d’environ 1 point, écart qui s’est maintenu en 2013 et en 2014.

Les taux d’emploi selon le plus haut diplôme

Il est bien certain que le taux d’emploi varie en général positivement avec le niveau de scolarité. Mais, à quel point? L’effet est-il le même chez les femmes et les hommes? C’est à ces questions que permet de répondre le graphique suivant.

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La première série de barres permet de voir que le taux d’emploi des hommes (barre rouge) et des femmes (barres jaunes) âgées de 25 à 54 ans était en 2014 assez semblable (83,0 % par rapport à 79,4 %). Les niveaux et les écarts selon le sexe variaient toutefois grandement selon le niveau de scolarité. Chez les hommes, le taux d’emploi augmente de 17 points de pourcentage (de 65 % à 82 %) entre ceux qui ont moins d’un DES et ceux qui en ont un, puis d’un autre cinq points entre ces derniers et ceux qui ont un diplôme d’études postsecondaires. Il augmente encore un peu chez les titulaires d’un baccalauréat (d’un point, différence qui pourrait sembler peu significative compte tenu des marges d’erreur, mais qui est présente au cours de presque toutes les 25 années de la série), mais diminue ensuite de plus de deux points (de 87,9 % à 85,5 %) chez les titulaires d’un diplôme supérieur au baccalauréat. Comme on peut se demander si cette différence est significative, j’y reviendrai un peu plus loin.

Chez les femmes, le taux d’emploi augmente bien plus que chez les hommes entre celles qui ont moins d’un DES et celles qui en ont un, soit de 25,5 points de pourcentage (de 46,7 % à 72,2 %), et aussi davantage entre celles qui ont un DES et celles qui ont un diplôme d’études postsecondaires (de 13 points – au lieu d’une augmentation de seulement cinq points chez les hommes – soit de 72,2 % à 85,2 %). Il demeure toutefois assez fixe entre ces dernières et celles qui sont titulaires d’un baccalauréat et d’un diplôme supérieur au baccalauréat.

mt_femmes12_4Il vaut la peine de revenir sur la différence du taux d’emploi entre les personnes qui sont titulaires d’un baccalauréat et celles qui ont obtenu un diplôme supérieur au baccalauréat. Le graphique ci-contre montre l’écart du taux d’emploi entre les titulaires d’un diplôme supérieur au baccalauréat et les titulaires d’un baccalauréat chez les hommes et les femmes. On peut y voir que le taux d’emploi des hommes titulaires d’un diplôme supérieur au baccalauréat (ligne bleue) était supérieur à celui des titulaires d’un baccalauréat en début de période et qu’il lui était au contraire moins élevé en fin de période. Pour mieux voir la tendance, compte tenu que les données bougent beaucoup, ce qui est normal en raison des volumes relativement faibles, surtout en début de période, j’ai justement ajouté une courbe de tendance linéaire qui présente une forte pente descendante. Chez les femmes (ligne rouge), il est beaucoup plus difficile de voir si le même phénomène s’observe. De fait, la courbe de tendance linéaire diminue aussi, mais beaucoup moins et demeure en territoire positif (mais d’à peine un point de pourcentage), même en fin de période.

Il est beaucoup plus facile d’observer ce phénomène que de l’expliquer. On pourrait penser qu’on forme dorénavant trop de diplômés aux études supérieures (enfin, si on espère que ces personnes aient un fort taux d’emploi) ou qu’on en fait trop venir de l’étranger. Pourtant, même si la proportion de femmes titulaires d’un diplôme supérieur au baccalauréat est maintenant plus élevée que celle des hommes, leur taux d’emploi demeure plus élevé que celui des bachelières. Peut-être est-ce en raison des domaines d’études choisis par les hommes et les femmes, mais les données de l’EPA ne permettent pas de trancher.

Les taux de chômage selon le plus haut diplôme

Rendu là, il était bien sûr tentant de savoir si les taux de chômage suivent les mêmes écarts que les taux d’emploi. C’est ce que le graphique suivant permet de voir. Encore là, on peut voir que la situation s’améliore rapidement entre les personnes qui ont moins d’un DES et celles qui en ont un, et plus graduellement entre ces dernières et celles qui ont un baccalauréat, et qu’elle se détériore un peu, uniquement chez les hommes, chez celles qui ont obtenu un diplôme supérieur au baccalauréat. On observe ici aussi que la faible scolarité nuit plus aux femmes qu’aux hommes, la seule catégorie où le taux de chômage est plus élevé chez les femmes que chez les hommes étant celle des personnes qui ont moins d’un DES.

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Et alors…

Même si ce billet ne répond pas à toutes les questions sur l’évolution de la diplomation et ses conséquences, il montre tout de même la forte hausse de celle-ci, chez les hommes et encore plus chez les femmes. Il permet aussi de confirmer l’impact majeur de la diplomation sur la situation sur le marché du travail, impact encore plus fort chez les femmes que chez les hommes.

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