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L’effondrement

10 août 2015

collapsologieQuand j’ai écrit un billet sur le livre Destruction massive – Géopolitique de la faim de Jean Ziegler, je n’ai pas pu faire autrement que de le qualifier de livre d’horreur. Bien que l’image était selon moi bien choisie, elle s’applique encore plus à Comment tout peut s’effondrer : petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes de Pablo Servigne et Raphaël Stevens.

Le début

«Tout le monde a su que le GIEC avait publié un nouveau rapport sur l’évolution du climat en 2014, mais a-t-on vu un réel débat sur ces nouveaux scénarios climatiques et sur leur implication en termes de changement social? Non, bien sûr. Trop catastrophiste.»

Cette citation, tirée de l’introduction du livre, met bien la table pour la suite. Comment cela se fait-il que la population et les politiciens n’aient pas réagi davantage face à ce rapport plus qu’inquiétant? Avant d’aborder ce genre de question, les premiers chapitres présentent plutôt le portrait de la situation actuelle et à venir de façon prévisible.

Pour les auteurs, l’effondrement est «le processus à partir duquel les besoins de base (eau, alimentation, logement, habillement, énergie, etc.) ne sont plus fournis (à un coût raisonnable) à une majorité de la population par des services encadrés par la loi». Il s’agit d’un processus à grande échelle irréversible, mais ce n’est pas la fin. On ne sait pas trop à quoi aura l’air la suite, mais, selon l’ampleur et la soudaineté de cet effondrement «la situation pourrait devenir incommensurablement catastrophique», le mot le plus important ici étant «pourrait»…

L’état des lieux ou les prémices d’un effondrement

Dans la première partie du livre, les auteurs présentent l’état des lieux. Je ne ferai ici que mentionner leurs principaux constats. Le premier d’entre eux est que la croissance exponentielle que l’économie mondiale a connue au cours des derniers siècles fera face à un plafond, soit la capacité de charge de la Terre. Ce plafond se concrétise par des limites et des frontières.

Les limites sont des quantités maximales à la fois de stocks (énergies fossiles, matières premières, etc.) et de flux (eau, bois, aliments, etc.), renouvelables certes, mais qu’on exploite à des rythmes supérieurs à leur capacité de régénération. Les frontières sont les seuils à ne pas dépasser «sous peine de déstabiliser et de détruire les systèmes qui maintiennent notre système en vie»: climat, écosystèmes, etc. Sachant que l’atteinte d’une seule des limites et le dépassement d’une seule des frontières suffiraient à sérieusement déstabiliser la civilisation, on peut imaginer les conséquences de l’atteinte de plusieurs limites et du dépassement plusieurs frontières simultanément.

– Les limites

L’énergie est au cœur de toute civilisation, surtout «industrielle et consumériste» comme la nôtre. Or, la principale source d’énergie, le pétrole, a déjà atteint son pic. Certes d’autres gisements sont découverts, mais ils sont beaucoup moins productifs. Sans énergie accessible, «c’est la fin de l’économie telle que nous la connaissons : les transports rapides, les chaînes d’approvisionnement longues et fluides, l’agriculture industrielle, le chauffage, le traitement des eaux usées, Internet, etc.».

Certaines des matières premières les plus utilisées par notre économie sont aussi à leur pic de production, notamment l’argent, le lithium, l’indium, le phosphate et… l’eau potable! Et, ces ressources sont difficilement remplaçables (surtout pas l’eau!), car la recherche d’autres ressources et leur exploitation exigeraient plus d’énergie, énergie ayant elle-même atteint son pic… Les auteurs concluent : «Nous vivons donc probablement les derniers toussotements du moteur de notre civilisation industrielle avant son extinction».

– Les frontières

  • le climat et la diversité : l’importance des conséquences du réchauffement climatique est relativement bien connue. Seule l’ampleur du réchauffement est encore incertaine. On sait qu’il aura des effets négatifs sur l’approvisionnement en eau, sur le rendement agricole, sur les courants marins et sur la perte de biodiversité (dont les conséquences sur les interactions écologiques ne sont pas suffisamment médiatisées, notamment sur la qualité de l’air, la séquestration du carbone, la fertilité des sols, le recyclage des déchets, la pollinisation et la prévention des maladies infectieuses), effets qui pourraient déboucher sur la sixième extinction. Les auteurs précisent que certaines régions du monde subiront le réchauffement climatique de façon encore plus dramatique que d’autres, notamment l’Inde, le Pakistan et le Bengladesh, élargissant encore les inégalités entre pays et à l’intérieur des pays. La possibilité d’un retour du cycle classique suivant bien des catastrophes ne doit pas être occultée : famines, maladies et guerres;
  • l’acidification des océans : conséquence des émissions de gaz à effet de serre, l’acidification des océans menace carrément la vie marine et l’alimentation humaine, tout en réduisant la capacité des océans à absorber le gaz carbonique de l’atmosphère, accentuant ainsi l’ampleur du réchauffement climatique;
  • la réduction de l’ozone stratosphérique : cette frontière nous est apparue de façon bien nette dans les années 1970; elle est peut-être moins d’actualité de nos jours, mais le dépassement de cette frontière demeure inquiétante et certains facteurs la menacent encore;
  • la perturbation du cycle du phosphore et de l’azote : le déversement de ces produits dans la nature, surtout dans les activités agricoles, est trop intense pour permettre à la nature de les absorber; on assiste donc à l’eutrophisation des eaux : l’eau n’est plus potable, les cyanobactéries (ou algues bleues) toxiques pour les humains et les animaux non humains se multiplient, la faune aquatique meurt par manque d’oxygène, etc.
  • la charge en aérosols atmosphériques : certains de ces aérosols menacent la couche d’ozone; on ne connaît pas encore toutes les conséquences de leur multiplication, due entres autres à la combustion de carburants fossiles;
  • la consommation d’eau douce : la limite d’utilisation n’est pas atteinte, mais elle s’approche, surtout en raison de la croissance de la population, de son utilisation dans l’agriculture et du changement climatique; son dépassement aurait bien sûr des conséquences catastrophiques (même cet adjectif extrême semble doux par rapport aux conséquences du manque d’eau douce); 80 % de la population serait actuellement exposée à des pénuries, notamment dans les deux pays les plus peuplés de la planète, l’Inde et la Chine;
  • le changement d’affectation des terres : comme la baisse du couvert forestier, un des plus importants puits de carbone;
  • la pollution chimique et atmosphérique : on parle ici des effets des produits chimiques de synthèse sur la santé humaine (et des animaux non humains), effets très inquiétants chez les femmes enceintes et leur embryon, et chez les enfants, mais aussi chez les abeilles (pesticides) et bien d’autres animaux (les papillons monarques, par exemple). La pollution atmosphérique menace les habitants des grandes villes et force même l’arrêt de l’activité économique de façon de plus en plus fréquente.

De ces neufs frontières, quatre auraient déjà été dépassées, alors que le dépassement des deux premières suffisent pour «faire basculer la vie humaine». Comme on l’a vu, ces frontières sont en grande partie liées : le dépassement d’une frontière entraîne le dépassement d’autres frontières.

Les autres chapitres

Le reste du livre aborde d’autres aspects de la question, expliquant par exemple pourquoi nous ne réagissons pas davantage à cette menace qui donne froid dans le dos (il est temps que je finisse ce billet…). Les auteurs abordent entre autres :

  • les verrouillages socio-techniques : ceux-ci expliquent qu’on reste pris avec des technologies inadéquates parce que celles-ci sont bien implantées et qu’il est trop difficile socialement de les changer; ce concept s’applique aussi bien au désir de la croissance infinie qu’à la difficulté de changer son mode de vie (lâcher l’auto, cesser de prendre l’avion, ralentir l’étalement urbain, etc.);
  • la fragilité des systèmes complexes : ces systèmes sont liés à la finance (on l’a vu lors de la crise débutée en 2007), à l’économie, aux flux tendus (système appelé souvent «just in time», qui fait en sorte qu’on garde de moins en moins de stocks et qu’un retard dans la livraison d’une seule des matières utilisées pour la production d’un bien ou d’un service peut paralyser cette production), aux chaînes collapsologie1d’approvisionnement, aux infrastructures, etc. Il suffit parfois d’un événement à première vue anodin pour que ces systèmes, fortement interdépendants, s’enrayent avec des conséquences toujours importantes, parfois dramatiques. Cela laisse penser que, quand l’effondrement commencera, il s’aggravera rapidement (un genre de moment Minsky nullement spécifique à la finance…), un peu comme le coyote qui reste suspendu dans les airs jusqu’à ce qu’il réalise sa situation et tombe dans le vide…
  • les prévisions du moment où l’effondrement aura lieu (ce que les auteurs refusent avec raison de faire);
  • les signaux avant-coureurs (qui peuvent provenir de différentes sources);
  • les modèles de prévisions : comme celui du Club de Rome (World 3), qui fonctionne vraiment trop bien, même s’il date de plus de 40 ans, et dont les prévisions sont loin d’être réjouissantes;
  • les stades de l’effondrement : il est fort possible que l’effondrement se réalise dans cet ordre : finance, économie, politique, société et culture (auxquels s’ajouterait l’écologie);
  • la psychologie de l’effondrement : ou pourquoi tant de personnes ne croient pas l’effondrement probable : les barrières cognitives (nous avons évolué en nous inquiétant des dangers à court terme, concrets et visibles, pas des dangers conceptuels à long terme), le déni, etc.
  • les types de réactions : du jemenfoutisme au survivalisme en passant par l’aquoibonisme et le catastrophisme (le terme «collapsologie» utilisé par les auteurs m’irrite…);
  • les réactions humaines : nous entraiderons-nous ou nous entretuerons-nous? Les auteurs penchent pour la première possibilité, mais ne peuvent en être certains…
  • les voies de sortie : il n’y en a pas vraiment, quoique les auteurs appuient les adeptes de la décroissance, car un effondrement graduel auquel on s’adapte est préférable à l’effondrement brutal auquel peu de gens pourront s’adapter.

Et alors…

Alors, lire ou ne pas lire? Pour moi, la question ne se pose pas, il s’agit d’une lecture essentielle. Je ne prétendrai pas avoir appris beaucoup d’éléments sur les dangers auxquels la survie de l’espèce humaine fait face, mais aucun livre que j’ai lu avant cela, même pas l’excellent Tout peut changer, Capitalisme et changement climatique de Naomi Klein (dont j’ai parlé dans ce billet), ne présente les facteurs qui nous mènent à l’effondrement de façon aussi claire et en faisant des liens aussi pertinents entre tous ces facteurs.

Cela dit, attendez-vous à quelques frissons. On a beau savoir ce qui nous attend, se le faire présenter de façon aussi crue peut quand même nous ébranler. Malgré tout, cette lecture demeure essentielle, car ce n’est qu’avec cette connaissance qu’on peut avoir une petite possibilité d’amoindrir les effets de l’effondrement qui est, lui, inéluctable.

31 commentaires leave one →
  1. Sciencesenviro permalink
    10 août 2015 9 h 31 min

    Merci pour cet excellent résumé. Ça donne envie de lire cet ouvrage. J’avais rédigé un petit billet en 2012 sur le concept de frontières à ne pas dépasser. L’équipe de Joan Rockström est à la pointe à ce sujet.

    http://sciencesenviro.com/2012/10/30/les-frontieres-a-ne-pas-depasser/

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  2. Sciencesenviro permalink
    10 août 2015 9 h 37 min

    A reblogué ceci sur Sciencesenviro – Les sciences et l'écologie vulgarisées pour touset a ajouté:
    Un excellent résumé de l’ouvrage à lire sur le blogue de Jeanne Émard.

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  3. 10 août 2015 11 h 06 min

    Je crois effectivement que les réflexions sur les conséquences possibles de l’action humaine, à grande échelle, sont indispensables pour nos choix politiques. En ce sens, ce livre paraît bien baliser la question.

    Mais quel est le ton de l’ouvrage? S’il est alarmiste, je trouve que nous vivons déjà suffisamment dans la peur: peur constante de tomber en récession, de subir une « décote », peur d’une attaque terroriste, etc., ne manque plus que la peur de la fin du monde.

    Il faut un équilibre entre l’apathie et la panique, c’est-à-dire l’action engagée soutenue par une philosophie globale de gauche. Promouvoir des valeurs et des politiques de gauche me semble être le meilleur remède au « collapsisme ».

    Par ailleurs, il y a toujours eu des atrocités commises par l’impérialisme et le colonialisme occidental. Que craignent les auteurs, l’effondrement de cette hégémonie occidentale? Pourquoi se soucier que des horreurs futures et non des horreurs présentes qui touchent des millions de gens (Syrie, est du Congo, etc.). Hypothèse: on a peur que le système finisse par s’écrouler « aussi » en Occident?

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  4. 10 août 2015 11 h 17 min

    «Mais quel est le ton de l’ouvrage?»

    Le livre aborde justement cette question. Il tente d’éviter l’alarmisme (avec notamment sont «pourrait» de «On ne sait pas trop à quoi aura l’air la suite, mais, selon l’ampleur et la soudaineté de cet effondrement «la situation pourrait devenir incommensurablement catastrophique», le mot le plus important ici étant «pourrait»…»), mais ne l’évite pas totalement. Comment peut-on l’éviter complètement quand on fait le tour de toutes les limites et frontières?

    Il se refuse par contre à faire des prévisions, ni sur le moment, ni sur les conséquences de la fin de la civilisation «industrielle et consumériste», qui surviendra tôt ou tard, de façon graduelle, laissant le temps à l’adaptation, ou plus abrupte, ce qui serait alors «catastrophique».

    «Par ailleurs, il y a toujours eu des atrocités commises par l’impérialisme et le colonialisme occidental.»

    Tiens, ça s’est le sujet du billet que j’ai écrit hier et que je publierai dans deux semaines…

    «Que craignent les auteurs, l’effondrement de cette hégémonie occidentale?»

    Ils n’abordent pas cette question, sinon pour dire que ce sont les pays les plus pauvres qui sont les plus exposés aux pénuries.

    «Pourquoi se soucier que des horreurs futures et non des horreurs présentes»

    Il faut faire les deux…

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  5. 10 août 2015 11 h 21 min

    «Il faut faire les deux…»

    J’ajouterai que l’hégémonie occidentale et ses conséquences sont tout à fait liées à la civilisation «industrielle et consumériste».

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  6. 10 août 2015 12 h 44 min

    Par rapport au ton, je me demandais s’il y avait de l’autodérision, s’ils prenaient la chose avec un de sel. Car comment peuvent-ils faire preuve de prudence en ne faisant pas de prévision, tout en ajoutant l’adverbe « incommensurablement » à « catastrophique ». S’ils se prennent au sérieux ce serait alors de l’humour involontaire.

    Pour clarifier ma critique, j’avais deux anecdotes personnelles en tête.

    (1) Tout d’abord celui de la Grèce. Plusieurs médias considèrent le cas grec de manière alarmiste, présageant la fin de l’Union européenne (et du système économique occidental?) alors que le PIB du pays ne représente que 1,3% du PIB européen. J’ai des amis (qui ne sont même pas de gauche) qui ont pleuré de joie à la victoire du Oui au référendum. Ils se sont laissés prendre par le ton catastrophiste des médias, alors qu’il se passe des choses bien pires ailleurs (et pas si loin de la Grèce).

    (2) Quand j’étais petit, mon beau-père me disait que c’était évident que je n’allais jamais vivre jusqu’à 18 ans, car une catastrophe naturelle approchait. Il me disait: « tu n’écoutes pas le canal météo? chaque jour il y a toujours plus de désastres naturels et de records de climat ». Mon beau-père n’est finalement jamais passé à l’action et déteste toujours la gauche.

    Bref, je dis cela mais je pense qu’on est d’accord sur le fond, seules des actions politiques et citoyennes de gauche, sur tous les fronts, pouvaient, peuvent et pourront améliorer les choses.

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  7. 10 août 2015 13 h 30 min

    « je me demandais s’il y avait de l’autodérision, s’ils prenaient la chose avec un de sel.»

    Je n’irais pas jusque là, mais le livre se lit bien, est très centré sur les faits. Il y a peut-être un peu d’autodérision dans la partie sur les types de réactions (castastrophistes et autres).

    «tout en ajoutant l’adverbe « incommensurablement » à « catastrophique »»

    Oui, mais en atténuant avec «pourrait» et avec «ce n’est pas la fin».

    «je pense qu’on est d’accord sur le fond, seules des actions politiques et citoyennes de gauche, sur tous les fronts, pouvaient, peuvent et pourront améliorer les choses.»

    On est du même bord, mais, si on peut améliorer les choses dans une foule de domaines (surtout socioéconomiques), en ce qui concerne le sujet du livre, je considère qu’on peut surtout atténuer les conséquences.

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  8. Raymond Lutz permalink
    10 août 2015 14 h 53 min

    Bonjour,

    Y a-t-il du monde ici qui lisent le blogue de Harvey Mead? On y discute justement du livre de Servigne. Sans lire l’ouvrage on peut regarder cette entrevue chez Mediapart:

    https://www.youtube.com/watch?v=1vWgLOB7nE0 .

    Que pensez-vous des critiques de « transitionisme »? Celles faites dans les commentaires par P.A Cotnoir et H. Mead? Ce dernier affirme au sujet de Servigne : « Je suis surpris qu’il embarque dans l’idée de transition, alors qu’il indique dans l’entrevue que c’est une approche qu’il critique. »

    http://www.harveymead.org/2015/08/04/catastrophisme-pour-de-vrai/#comment-592

    Y a-t-il une définition convenue et largement consensuelle du mouvement de transition pour qu’on puisse ainsi le critiquer et le reléguer à un « survivalisme communard »?

    J’aurais pu poser la question là-bas, pas ici…. 😎 Mais j’ai peur de trop déranger…. 😎

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  9. 10 août 2015 17 h 51 min

    «Y a-t-il du monde ici qui lisent le blogue de Harvey Mead? »

    Je lis parfois certains de ses textes, mais pas régulièrement. J’ai déjà échangé avec lui sur son livre «L’indice de progrès véritable du Québec» et disons avec euphémisme qu’il n’acceptait aucune critique, même constructive.

    «Que pensez-vous des critiques de « transitionisme »?»

    Je partage en partie le commentaire de M. Cotnoir sur le fait que les deux premières parties du livre sont les plus fortes. Par contre, j’ai perçu la troisième partie davantage comme un survol ou une présentation des réactions et des options possibles que comme une prise de position ferme pour un mouvement, sauf celui de la décroissance, et, même là, avec certaines réserves.

    J’avoue être un peu perdu avec sa remarque sur le «mouvement transitionniste». Vous remarquerez qu’il dit : «Il semble privilégier le mouvement transitionniste». Sembler me semble faible pour lui reprocher de l’appuyer! Notez que Mead répond que «Je suis surpris qu’il embarque dans l’idée de transition, alors qu’il indique dans l’entrevue que c’est une approche qu’il critique.». Bref, ça ressemble à ma perception, soit qu’il ne prend pas vraiment position dans ce livre.

    «Y a-t-il une définition convenue et largement consensuelle du mouvement de transition»

    Je ne m’y connais pas du tout! Cela dit, j’ai trouvé cela qui me semble correspondre à ce qu’on trouve dans le livre en lien avec le mouvement de décroissance :

    Les initiatives de transition

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  10. Raymond Lutz permalink
    10 août 2015 19 h 51 min

    merci mais je n’ai pas été assez clair: que peut-on reprocher au mouvement de transition?

    Moi je lis la page que vous avez référée et je n’y lis que du bon… résilience, crise, etc… Bien sûr, on n’y parle pas d’effondrement, et puis?

    Ça va chier, faut se préparer… C’est tout! Qu’on appelle ça effondrement, renaissance, transition, extinction… Je trouve qu’on perd beaucoup de temps (et d’occasion d’oeuvrer ensemble) à se picosser dessus pour des niaiseries.

    Pendant ce temps là, les gens de TransCanada, eux, s’affairent…

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  11. 10 août 2015 20 h 11 min

    «Je trouve qu’on perd beaucoup de temps (et d’occasion d’oeuvrer ensemble) à se picosser dessus pour des niaiseries.»

    Bien d’accord!

    « que peut-on reprocher au mouvement de transition?»

    Il faudrait leur demander! Peut-être jugent-ils ça insuffisant? Difficile à généraliser? Mais, est-ce ça qu’ils veulent dire? Aucune idée!

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  12. Raymond Lutz permalink
    11 août 2015 10 h 20 min

    « Il faudrait leur demander! »

    D’accord, j’y vais de ce pas, quitte à me faire varloper au passage [1] comme lorsque j’ai critiqué « l’économie écologique » dans un commentaire [2] 😎

    [1] http://www.harveymead.org/2014/06/05/leconomie-ecologique-au-quebec-bis/
    [2] http://www.harveymead.org/2014/06/03/le-fmi-reconnait-lapproche-de-leconomie-ecologique/#comment-269

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  13. 11 août 2015 11 h 19 min

    Mead est en contradiction avec lui même. Il reconnaît qu’il est parfois (moi souvent) impossible de calculer une valeur aux externalités («Je peux bien comprendre que le calcul de presque toutes les composantes de l’IPV comporte des failles»), mais il le fait.

    Cet exercice a sûrement une valeur pédagogique, mais donne aussi l’illusion qu’il est possible de corriger le PIB en lui soustrayant la valeur des externalités (ou en les intégrant), ce qui est, pour moi et même pour lui, impossible.

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  14. Athinael permalink
    12 août 2015 1 h 45 min

    En complément de l’article sur l »effondrement :
    Philippe Bihouix, « Du peak oil au peak everything : vers une pénurie des métaux », École des Mines de Nantes, 24 janvier 2013.

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  15. Athinael permalink
    12 août 2015 1 h 47 min

    Un complément : Philippe Bihouix, Darweek 2015, Bordeaux, juin 2015, 1 de 2

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  16. Thérèese Lavoie permalink
    12 août 2015 14 h 24 min

    Raymond Lutz, j’ai lu les commentaires sur le blog de Harvey Mead et j’ai été aussi surprise de ces reproches faites au initiatives de transition. Dans la vidéo, Pablo Servigne dit qu’il a évité le terme de transition parce qu’il est galvaudé. Et je suis assez d’accord avec lui. Certains croient que la transition est celle vers les énergies renouvelables ou vers le capitalisme vert. Ce qui n’a rien à voir avec le mouvement initié par Rob Hopkins. Ce mouvement est beaucoup plus en phase avec les  »low tech » proposé par Philippe Bihouix ci-haut, car il montre le lien entre les trois grandes crises de notre époque: énergétique, économique et environnementale. Les trois E comme on les appelle. Pablo Servigne est clairement dans l’esprit de la transition bien comprise, qui consiste à se préparer ou à tenter de mitiger les effets de l’effondrement en cours. On peut critiquer l’usage du mot transition au lieu du mot effondrement, mais on parle de la même réalité.

    En passant, excellente recension Darwin.

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  17. 12 août 2015 14 h 44 min

    Merci!

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  18. 12 août 2015 17 h 02 min

    Texte intéressant et tout à fait en lien avec l’idée de mettre un prix sur les externalités…

    «The current neoliberal capitalist development model assumes limitless economic growth, and that market failures can be corrected by pricing Nature”, says Spash. “This system is neither economically, socially nor ecologically sustainable. Allying with corporations is nothing more than supporting the old ideology of economic growth, neoliberalism and technocracy»

    ou

    «Le modèle actuel de développement capitaliste néolibéral suppose une croissance économique illimitée, et que les défaillances du marché peuvent être corrigées en mettant un prix à la nature « , dit Spash. «Ce système est ni économiquement, ni socialement, ni écologiquement durable. Les alliances avec des sociétés commerciales ne peuvent que soutenir la vieille idéologie de la croissance économique, le néolibéralisme et la technocratie»

    http://www.degrowth.org/conservation-biologists-question-the-economic-growth-paradigm

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  19. Raymond Lutz permalink
    13 août 2015 13 h 23 min

    Merci pour vos réponses, Thérèse et Darwin. Elles sont claires et concises, contrairement à celles que j’ai obtenues ailleurs… 😎

    Primo, j’ai trouvé une autre vidéo de Servigne, aux Rencontres Déconnomiques 2015 [4]. Il est vraiment chou: faut l’inviter ici, en nos quelques arpents de glace en Canada (Voltaire).

    Secundo, je sens que le fruit est mûr, il faut brasser l’arbre: fondons l’Association des Collapsologues du Québec [1].

    Notre message doit prendre plus de place dans l’espace public. Déjà on voit poindre dans la presse mainstream des affirmations que l’on taisait avant (mais largement discutées dans certains cercles)…

    Exhibit un: Linda Joy McQuaig (candidate NPD) qui déclare que « a lot of the oil sands oil may have to stay in the ground if we’re going to meet our climate change targets. » Et cette évidence fait des vagues… 😎 [2]

    Exhibit deux: L’hebdomadaire Voir publie une colonne environnementale « ÉNERGIE ET ENVIRONNEMENT » qui, dieu merci, est loin de faire l’apologie de  » l’économie verte » [3] et ose « parler des vraies affaires », comme Mario Dumont!

    Regroupons-nous, rencontrons-nous et prenons le crachoir! Meade aussi pressent que le moment est venu et suggère un projet de rencontre en fin d’un de ces commentaires [5].

    J’interpelle Jean-Martin Fortier ainsi sur son blogue [6]:

    Comme on dit, les carottes sont cuites… Il faut s’ouvrir les yeux et faire le froid constat. Il faudra bien cependant nourrir les gens. Et les soigner. Et les policer. Et leur donner espoir, l’espoir d’une sortie de scène digne et paisible…

    [1] Contrairement à M.Cotnoir (commentateur sur http://www.harveymead.org) j’aime bien le terme collapsologie: il roule en bouche et me rappelle le verbe truculent de Sol (le clown)…
    [2] http://www.ledevoir.com/politique/canada/447242/elections-du-19-octobre-tempete-de-sable
    [3] http://voir.ca/philippe-gauthier
    [4] https://www.youtube.com/watch?v=2b6npw-xgvM
    [5] http://www.harveymead.org/2015/08/04/catastrophisme-pour-de-vrai/#comment-601
    [6] http://lejardiniermaraicher.com/lheritage-retrouve-des-maraichers-du-xixeme

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  20. 13 août 2015 13 h 41 min

    «j’aime bien le terme collapsologie»

    Pas moi, je l’ai mentionné dans le billet. L’emprunt linguistique est parfois nécessaire, mais pas dans ce cas.

    Par ailleurs, je veux simplement préciser que les commentaires contenant au moins cinq liens sont automatiquement modérés. Ce fut le cas de celui-ci.

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  21. Raymond Lutz permalink
    13 août 2015 15 h 15 min

    ah bon… je me souvenais bien que quelqu’un n’aimait pas ce terme… proposez-vous une alternative? Effrondologie? Est-ce si important? Je me répète: collapsologie est amusant à dire, tout comme pataphysique. Pousserez-vous votre déplaisir à bouder l’association?

    Bon, je badine un peu car le sujet est grave.

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  22. 13 août 2015 17 h 50 min

    «Est-ce si important?»

    Non.

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  23. 13 août 2015 18 h 07 min

    J’ai écrit : «Les limites sont des quantités maximales à la fois de stocks (énergies fossiles, matières premières, etc.) et de flux (eau, bois, aliments, etc.), renouvelables certes, mais qu’on exploite à des rythmes supérieurs à leur capacité de régénération. »

    Bien, voilà, notre flux annuel est déjà consommé…

    «Cette année, la planète aura donc atteint ses limites en huit mois. Ainsi, de façon théorique, la consommation de l’humanité pour le reste de l’année se traduira en un déficit écologique croissant.»

    http://ici.radio-canada.ca/nouvelles/environnement/2014/08/19/001-terre-resssources-jour-depassement-global-footprint-network.shtml

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  24. Yves permalink
    14 août 2015 6 h 51 min

    «En 1970, le «jour du dépassement» n’était survenu que le 23 décembre. Mais depuis, sa date n’a cessé de régresser: 3 novembre en 1980, 13 octobre en 1990, 4 octobre en 2000, 3 septembre en 2005, 28 août en 2010.«

    En 2066, le 1 janvier à 6 h 46 et en 2069 le 1 janvier à 32 minutes…

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  25. 14 août 2015 8 h 14 min

    «En 2066, le 1 janvier à 6 h 46 et en 2069 le 1 janvier à 32 minutes…»

    Ce serait étonnant, car pour en arriver là, il faudrait avoir déjà vidé les ressources de la Terre et l’effondrement aurait eu lieu bien avant!

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  26. Yves permalink
    14 août 2015 15 h 33 min

    Il se peut que mes prédictions et ce en de très rares occasions soient défaillantes. La perfection n’est pas de ce monde. 😉

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  27. Réah permalink
    4 juillet 2018 21 h 58 min

    Si on concevait la pollution comme un gaspillage de ressources qui devrait être économiquement sanctionné de manière à éliminer les entreprises les moins performantes? Qu’en pensez-vous?

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  28. 4 juillet 2018 22 h 47 min

    Il faudrait que vous précisiez votre proposition en expliquant quels moyens vous envisageriez.

    À première vue, cette proposition ressemble à l’idée d’internaliser les externalités négatives, un peu comme le propose Harvey Mead, l’ex-Commissaire au développement durable du Québec, dans son livre «L’indice de progrès véritable du Québec» (http://multim.com/titre/?ID=343 ), comme je l’ai mentionné dans mes commentaires précédents. Personnellement, je n’appuie pas l’utilisation des forces du marché pour solutionner les problèmes de pollution (même si certaines mesures peuvent aider). Dans certains cas, comme ceux mentionnés dans «Comment tout peut s’effondrer» (si je me souviens bien, cela fait quand même trois ans que j’ai publié ce billet, mais comme ce livre m’a vraiment plu, je crois m’en rappeler assez bien), c’est la réglementation et l’interdiction que je favorise, avec aussi l’utilisation d’écotaxes, pas pour internaliser, mais pour désinciter.

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