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Comment l’homme détruit la vie

8 février 2016

6e extinctionLa 6e extinction, Comment l’homme détruit la vie, de Elizabeth Kolber a remporté en 2015 le prix Pulitzer de l’essai. Le thème de ce livre étant déjà attirant, ce fait n’allait surtout pas me décourager de le lire! Pour varier un peu mes présentations de livres, je ne résumerai pas chaque chapitre, mais tenterai plutôt de donner un aperçu plus global de ce livre.

Aperçu

L’auteure alterne son texte entre des anecdotes qu’elle a vécues et des informations plus globales. En général, j’ai peu d’intérêt pour les anecdotes personnelles, mais je dois reconnaître que, dans ce cas, cette méthode allège le contenu et rend la lecture plus agréable, d’autant plus que ces anecdotes ont toujours un lien fort avec le sujet abordé.

Ce livre fait vraiment le tour de la sixième extinction, soit celle de l’extinction actuelle d’un nombre affolant d’espèces aussi bien végétales qu’animales, extinction qui a amené des personnes à considérer la période depuis la révolution industrielle comme une nouvelle époque qui aurait succédé à l’Holocène, époque qu’ils ont baptisé l’Anthropocène. D’autres considèrent que l’Anthropocène aurait commencé dès la sortie de l’homo sapiens de l’Afrique, car c’est à ce moment qu’il aurait contribué à l’extinction de la mégafaune un peu partout sur Terre, comme l’a aussi affirmé Hubert Reeves dans son livre Là où croît le péril… croît aussi ce qui sauve dont j’ai parlé dans ce billet.

Ce livre présente de très nombreuses manifestations de cette extinction, notamment :

  • disparition de nombreuses espèces de grenouilles assez récemment au Panama et ensuite dans bien d’autres pays en raison de l’arrivée d’un champignon auparavant absent de ces pays, venu probablement d’Afrique ou en raison de l’importation de grenouilles européennes pour la cuisine ;
  • extinction du grand pingouin au XIXème siècle (par la chasse);
  • mise en danger des papillons (en raison de l’utilisation d’insecticides et de désherbants);
  • décès massifs des chauves-souris (en raison d’un autre champignon importé);
  • réduction des organismes biocalcifiants, notamment des récifs de corail qui pourraient disparaître complètement (en raison de l’acidification des océans due au réchauffement climatique);
  • extinctions massives de la flore et de la faune dans certaines régions (dues à la déforestation);
  • réductions massives des populations d’animaux vivant dans la jungle (que ce soit dû à la réduction des habitats ou au braconnage) ou près des pôles (l’auteure montre que passé un certain niveau de réduction, il est presque impossible de sauver les espèces dont la population est trop peu nombreuse);
  • extinction de toutes les espèces humanoïdes concurrentes (dont les Néanderthaliens);
  • disparition de très nombreuses espèces d’oiseaux (que ce soit par prédation de l’être humain, par l’importation d’espèces concurrentes ou par destruction des habitats).

Le livre aborde aussi les cinq grandes extinctions antérieures, toutes causées par des événements soudains (la soudaineté étant relative), que ce soit des glaciations, des éruptions volcaniques ou l’écrasement de météorites. L’auteure décrit aussi certaines des conséquences majeures de ces événements, comme celles de l’acidification des océans qui est, comme mentionné auparavant, un des effets potentiels les plus destructeurs du réchauffement climatique. Et elle conclut :

«La seule caractéristique commune de ces événements disparates est le changement, ou plus exactement, la vitesse du changement. Quand le monde change plus vite que le processus d’adaptation des espèces, beaucoup d’entre elles ne pourront pas survivre.»

Et alors…

Lire ou ne pas lire? Lire sans faute! Un peu volontairement, mon billet ne rend compte que d’une partie de l’intérêt de ce livre. Loin de lister les dommages causés par l’être humain, l’auteure en explore un certain nombre à fond, que ce soit en présentant des données ou (surtout) en accompagnant dans leurs travaux des scientifiques qui expliquent clairement ce qui se passe, aussi bien les raisons des disparitions d’espèces végétales et animales que les conséquences des activités humaines. Et, elle réussit à faire tout cela sans adopter un discours misanthrope et en intéressant toujours la personne qui lit son livre. Une réussite!

9 commentaires leave one →
  1. 8 février 2016 10 h 16 min

    Bravo pour ce bon résumé, je l’ai lu et vous donnez envie de le lire à celles et ceux que cela intéresse. Il devrait être une lecture obligatoire au Cégep ou en début de parcours universitaire, tous parcours confondus. Je me demande si un tel livre pourrait être adapter sous forme de documentaire. Je vulgarise les changements climatiques et je dois dire qu’il est terrible que le grand public soit si peu informé des dégâts énormes que nous infligeons à la biodiversité. Je vais être un peu grossier, mais à dessein : je pense que si chacun de nous pouvait ressentir la perte de la biodiversité dans notre quotidien, nous chierions toutes et tous dans nos frocs.

    Aimé par 1 personne

  2. 8 février 2016 12 h 16 min

    Très intéressant, et vraiment important à lire.

    Je dois avouer toutefois que l’usage du mot « homme » pour parler de l’humanité me semble toujours dépassé et ça m’énerve à chaque fois. À moins que l’auteure ait voulu dire que seuls les hommes, et pas les femmes, ont contribué à détruire la vie? Pour un livre traduit au Québec, ce choix m’étonne. 😉

    Aimé par 2 personnes

  3. 8 février 2016 13 h 29 min

    Pour la traduction, on parle d’une adaptation de la traduction pour le Québec. Mais, je suis bien d’accord!

    Aimé par 1 personne

  4. 29 août 2016 16 h 00 min

    Bon, c’est officiel, le concept d’Anthropocène a été adopté par Congrès géologique international aujourd’hui.

    « L’Homme est devenu une force telle qu’il modifie la planète », déclare à l’AFP Catherine Jeandel, directrice de recherche CNRS au Laboratoire d’études en Géophysique et Océanographie Spatiales (LEGOS), et membre de ce groupe de travail. « C’est inquiétant ».

    Pour la première fois en 4,5 milliards d’années, une espèce unique a radicalement changé la morphologie, la chimie et la biologie de notre planète.»

    Mais, cela prendra encore du temps avant que ce concept soit officiellement considéré comme une nouvelle ère :

    «Toutefois la route est encore longue avant que le changement d’époque ne soit officiellement acté. La proposition du groupe d’experts doit être soumise à une sous-commission sur la stratigraphie du Quaternaire, qui elle-même la présentera à la Commission internationale de stratigraphie avant qu’elle ne soit proposée au Comité exécutif de l’Union internationale des sciences géologiques (IUGS), une organisation non gouvernementale.»

    http://www.ledevoir.com/societe/science-et-technologie/478804/geologie-l-homme-a-fait-entrer-la-planete-dans-une-nouvelle-epoque

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