Une juste colère
Une juste colère – Gil Courtemanche, un journaliste indigné, de Martin Forgues «jette un regard sur l’oeuvre» de Gil Courtemanche, un homme qui «considérait le journalisme comme un puissant vecteur de justice». M’ennuyant toujours des chroniques de Courtemanche dans le Devoir (qui ne l’a toujours pas remplacé vraiment, mais est-il possible de le faire?), je me suis dit que cette lecture me permettrait de mieux connaître cet homme et ses réalisations.
Le livre
Les premières pages de ce livre sont consacrées à une courte préface de la fille de Gil Courtemanche, Anne-Marie, et à un avant-propos de l’auteur qui y explique le contexte de son premier contact avec les écrits de Courtemanche et l’importance que cet homme a eu dans sa décision de devenir journaliste.
1. Une juste colère : Après avoir mentionné ses regrets de ne jamais avoir rencontré Courtemanche, même s’il a eu une occasion de le faire un peu avant sa mort (le 19 août 2011), l’auteur montre que tous les écrits de l’auteur, que ce soit ses chroniques, ses romans, ses essais ou même les paroles d’une chanson, font ressortir son grand sens de la justice et sa profonde colère face aux injustices. Ce sont ces caractéristiques qui ont inspiré l’auteur dans son choix de pratiquer un journalisme indépendant.
2. Un journaliste humain : Ce chapitre s’attarde sur le style journalistique humain de Gil Courtemanche, en relatant ses expériences à La Presse, à Radio-Canada et dans le journal indépendantiste le Jour. L’auteur poursuit en donnant des exemples de ses reportages où il a appliqué ce style.
3. Un hérétique devant l’évangile de la neutralité : L’auteur explique le conflit que ressentait Courtemanche entre le dogme de neutralité journalistique (surtout radio-canadienne) et le devoir d’indignation que tout journaliste se doit de conserver. À ce sujet, l’auteur cite Albert Camus qui considérait essentiel que tout journaliste soit en mesure d’appliquer quatre commandements pour être véritablement libre : la lucidité, le refus, l’ironie et l’obstination. Cette attitude entraîne toutefois une conséquence plus discutable. Il peut amener à dénoncer des comportements acceptables et, surtout, à se féliciter d’événements qui se révéleront nocifs. Et l’auteur présente ses expériences dans le domaine…
4. Journaliste littéraire, littéraire journaliste : L’auteur explique ce qui permet de parler de journalisme littéraire. Il donne tout d’abord en exemple de ce type de journalisme le roman Un dimanche à la piscine à Kigali de Courtemanche, roman de fiction, mais basé sur des événements réels et sur des personnes ayant vraiment existé, puis Le Monde, le lézard et moi, autre roman basé sur des faits réels, et enfin d’autres de ses livres, même pour enfants. Selon l’auteur, c’est en raison de son rejet des médias traditionnels (et par les médias traditionnels) que Courtemanche a choisi de faire passer son indignation par des ouvrages de fiction.
5. Le crépuscule des grandes gueules : Gil Courtemanche fut selon l’auteur une des «grandes gueules» de son époque, avec, entre autres, Michel Chartrand et Pierre Bourgault. S’il y a encore des grandes gueules de nos jours, elles ont plutôt tendance à prendre le parti des puissants plutôt que de les dénoncer, comme le faisaient celles de l’époque de Courtemanche. L’auteur donne quelques exemples de ses chroniques dénonciatrices, toujours bien documentées, dans lesquelles il n’hésitait pas à s’attaquer aux comportements des puissants, comme Pierre-Karl Péladeau et Jean Charest.
Conclusion – Plaidoyer pour un journalisme de combat : «Les faits sont sacrés mais le commentaire est libre». Cette citation de Hubert Beuve-Méry, fondateur du journal Le Monde et du mensuel Le Monde diplomatique, résume très bien le style de journalisme pratiqué pas Gil Courtemanche et que l’auteur entend bien continuer à exercer.
Et alors…
Lire ou ne pas lire? Si j’en ai appris un peu sur l’œuvre de Gil Courtemanche, j’en ai appris davantage sur le style de journalisme que l’auteur entend exercer. Même si ses opinions sur le journalisme sont loin d’être inintéressantes, ce n’est pas du tout ce que je recherchais en décidant de lire ce livre. Ce livre n’a donc pas assouvi mon désir de mieux connaître l’œuvre du chroniqueur du Devoir dont je m’ennuie tant.
J’ajouterai que Louis Cornellier n’a pas tort de déplorer dans la chronique qu’il a consacrée à ce livre qu’il contient des «phrases incomplètes ou bancales» (dont une que j’ai trouvée complètement incompréhensible en conclusion du troisième chapitre). Même si cette lacune relève davantage de l’éditeur que de l’auteur, il demeure qu’on la subit en tant que lecteur.
J’ai lu «Nouvelles douces colères» en premier. Gil Courtemanche avait les mots justes pour décrire le cafard qu’avait provoqué chez moi la pauvreté du discours lors de la campagne électorale entre Lucien Bouchard et Jean Charest. Je me suis empressé de lire «Douces colères : journal». C’était exactement ce que j’avais ressenti lors de la «campagne électorale référendaire» sur le traité de libre-échange avec les États-Unis sans clauses sociales ni environnementales.
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