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La fabrique du viol

24 juin 2019

Avec son livre La fabrique du viol, Suzanne Zaccour, juriste, autrice et activiste, définit le concept de la culture du viol, parle «de nos réflexes misogynes face aux victimes, et de ce qu’il faut faire pour les désamorcer» et dénombre «les manières dont nous protégeons les violeurs sans même nous en rendre compte».

Le fantôme au bout du tunnel : L’autrice présente le contexte qui l’a amenée à écrire ce livre, explique le sens qu’elle donne aux termes viol (toute agression sexuelle) et victimes («pour rejeter sa connotation négative») et «appelle chaque lectrice, chaque lecteur à redoubler d’ardeur dans la lutte contre le viol».

1. Les victimes : «En théorie, tout le monde est contre le viol. En théorie, tout le monde est du côté des victimes. (…) En pratique cependant, les victimes qui dénoncent publiquement leur agression dérangent». L’autrice explique entre autres :

  • les raisons (notamment statistiques) pour lesquelles il faut croire les victimes;
  • que le concept de la crédibilité d’une victime est une fausse question;
  • que le délai entre un viol et sa dénonciation peut être dû à une foule de facteurs et qu’il ne change rien à la véracité des faits;
  • qu’il est faux de prétendre que le système de justice avantage les mères pour la garde des enfants;
  • l’importance d’«éduquer nos enfants au consentement»;
  • qu’un acquittement ou un refus de poursuivre ne signifient pas qu’il n’y a pas eu viol ou que la victime n’a pas dit la vérité, mais que la preuve ne permet pas d’obtenir une conviction hors de tout doute raisonnable;
  • le sens véritable de la présomption d’innocence et ses applications et limites;
  • que dénoncer un harceleur ou un agresseur, ce n’est pas faire preuve d’extrémisme ou de terrorisme, comme des chroniqueurs l’ont déjà affirmé, c’est au contraire légitime et courageux;
  • qu’on n’a pas besoin de connaître les détails d’un viol pour croire la victime;
  • qu’on devrait poser moins de questions aux victimes et plus aux agresseurs.

2. Les violeurs : Il n’y a pas de profil type d’un violeur. Tout ce qu’on sait, c’est qu’ils sont très nombreux, car les viols le sont. L’autrice explique entre autres :

  • que «les violeurs ne sont pas des porcs, pas des monstres, pas des sauvages, mais des hommes bien ordinaires»;
  • les raisons pour lesquelles la proportion de femmes qui ont été violées et d’hommes qui ont violé varie considérablement selon les sources (sous-estimation dans les statistiques officielles, définitions et perceptions variables, négation, etc.);
  • le concept de la culture du viol et en donne des manifestations dans nos lois, dans nos systèmes de justice, dans la vie courante, dans le monde du spectacle et ailleurs; elle ajoute une liste de 50 autres exemples, surtout tirés de la vie courante;
  • que la culture du viol bénéficie à tous les hommes, aux «bons gars» comme aux violeurs;
  • que, dans ce sens, «les hommes ont intérêt à perpétuer la culture du viol»;
  • qu’elle ne suggère pas de partir une guerre des sexes, car elle est malheureusement déjà en cours;
  • ce que les alliés peuvent faire pour contribuer à la lutte contre la culture du viol;
  • que les médias utilisent de nombreux termes atténuateurs pour minimiser l’importance des agressions sexuelles, déresponsabilisant ainsi l’agresseur;
  • qu’en matière d’agression sexuelle, «l’alcool excuse les actions de l’agresseur, mais condamne celles de la victime».

3. Le consentement : Contrairement à ce que certains prétendent, il n’y a pas de zones grises entre le consentement et le non-consentement : «la position par défaut n’est pas le consentement, mais le non-consentement». L’autrice explique entre autres :

  • qu’il «n’y a pas de consentement sans la possibilité de le révoquer»;
  • que céder n’est pas consentir;
  • que, dans trop d’œuvres de fiction, notamment dans de nombreux films, «l’insistance et le harcèlement sont récompensés».

Le paradoxe du viol : Ce paradoxe est le fait que le viol soit perçu comme un crime d’exception alors qu’il est relativement courant. Cela ne le rend pas moins tragique, au contraire. Si on veut y mettre fin, et tout le monde ou presque dit le vouloir, il faut prendre les moyens pour y parvenir. L’autrice conclut en proposant 15 actions à entreprendre contre la culture du viol.

Et alors…

Lire ou ne pas lire? Lire! Ce livre aborde un sujet difficile, mais essentiel. Même si je ne peux pas dire que j’ai trouvé ce livre agréable à lire (en raison des émotions qu’il fait surgir), l’autrice est très claire et a su bien structurer ses propos. Elle ne met pas de gants blancs et sait nous faire réfléchir. Malheureusement, les 132 notes sont placées à la fin du livre, toujours des références, mais parfois (je dirais même assez souvent) accompagnées de compléments d’information. C’est étrange, car il y a aussi des compléments d’information en bas de page!

On peut en plus lire ici une entrevue que l’autrice a accordée à Améli Pineda du Devoir et le compte-rendu de Rima Elkouri de La Presse.

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