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Mon école est bien meilleure que la tienne

16 septembre 2010

Par Darwin – Dans son édition du samedi 4 septembre, La Presse a publié une série d’articles sur l’école primaire publique. L’élément qui a le plus retenu mon attention est que «86% des répondants ont affirmé être très satisfaits ou plutôt satisfaits de l’école fréquentée par leur enfant». Dans le contexte de la grande popularité des écoles privées et des nombreuses critiques sur la réforme de l’éducation et sur notre école publique, on pourrait être surpris d’un tel résultat. Comme le dit si bien le président de la Fédération des comités de parents du Québec (FCPQ) : «Quand on leur (note : aux parents) parle, la meilleure école, c’est toujours celle où va leur enfant. Et c’est toujours ailleurs que ça va mal!».

Comme il ne semble pas que les sondeurs aient posé une question sur l’opinion des parents sur les autres écoles ou sur l’ensemble du système d’éducation public, on ne peut valider l’opinion du président de la FCPQ. Par contre, le Centre de recherche et d’intervention sur la réussite scolaire (CRIRES) a tenu une vaste enquête auprès des membres votants des conseils d’établissement en 2001, enquête qui a abordé entre autres cette question en détail, tant auprès des parents que du personnel scolaire et ce, tant au primaire qu’au secondaire.

Résultats de l’enquête

À la page 74 (numérotée 66) du rapport sur cette enquête, on apprend que les membres votants des conseils d’établissement notent beaucoup mieux leur école (2,27/5, 1 étant la note parfaite) que le système d’éducation québécois (3,02). Ainsi, 23 % des membres ont accordé une note de 1 ou 2 au système d’éducation, tandis que 68 % ont accordé ces notes à leur école !

Les résultats pour ces deux questions sont très semblables chez les employés des écoles et chez les parents, et ne se distinguent pas de façon significative entre les membres qui œuvrent au primaire et au secondaire. Il semble donc que la bonne perception de leur école par rapport aux autres écoles ne soit pas très différente au primaire et au secondaire.

Pourquoi cette différence ?

Les auteurs du rapport de cette enquête ne font que relever des corrélations entre les réponses des membres. Par exemple, ceux qui sont les plus sévères envers notre système d’éducation sont ceux qui sont aussi les plus critiques envers les changements qui ont été apportés au système d’éducation. Ils n’ont par contre pas avancé de facteurs qualitatifs pour expliquer la grande différence entre la perception de la qualité de leur école et celle de la qualité du système d’éducation.

On peut trouver normal que le personnel des écoles et les parents aient une meilleure perception de l’école qu’ils ont bien souvent choisie que des autres écoles qu’ils n’ont justement pas choisies. Mais quelles sont les sources d’information qui les amènent à être aussi sévères envers un système où on est satisfait de ce qu’on connaît bien (son école), mais insatisfait de ce qu’on connaît moins bien (les autres écoles) ?

Même s’il n’existe aucune donnée précise sur le sujet, certains facteurs, dont on ne peut malheureusement pas mesurer l’impact, peuvent expliquer cette différence de perception, surtout au sujet de la grande sévérité envers notre système d’éducation. Il me semble entre autres clair que le fait que les médias mettent beaucoup plus l’accent sur les points faibles du système d’éducation public, comme son taux de décrochage scolaire élevé (même s’il a baissé énormément depuis au moins 30 ans), que sur ses points forts – comme l’excellent résultat de nos élèves aux tests internationaux – ne peut qu’amener les parents et même le personnel des écoles à penser que leur école est l’exception qui confirme la règle… En fait, on s’aperçoit qu’au contraire, c’est ce qu’on considère comme l’exception (l’école publique qui donne satisfaction) qui est la norme et ce qu’on considère comme la règle (l’école publique qui ne donne pas satisfaction) qui est l’exception !

Espérons que des articles comme ceux présentés dans La Presse du samedi 4 septembre permettent de remettre les pendules à l’heure !

10 commentaires leave one →
  1. 16 septembre 2010 7 h 46 min

    As-tu vu le documentaire « Les enfants du palmarès »?

    C’est très intéressant:

    http://www.coteblogue.ca/articles/les-enfants-du-palmares/

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  2. jack permalink
    16 septembre 2010 12 h 43 min

    Je n’ai pas lu au complet le document. 230 pages, c’est volumineux. Je vais toutefois me permettre quelques commentaires.

    Premier commentaire: si je fais un sondage auprès de la population en général et si mon questionnaire ne porte que les 2 questions suivantes:
    1- Quelle est votre appréciation de la qualité moyenne des conducteurs automobiles au Québec?
    2- Quelle est votre appréciation de votre qualité en tant que conducteur automobile?
    Mon impression est que j’obtiendrai à peu près le même type de résultat: la majorité des gens se croient supérieurs à la moyenne.

    Statistiquement, c’est tout à fait possible (la médiane étant différente de la moyenne). Mais un autre phénomène entre en ligne de compte: les valeurs des répondants. C’est quoi, la qualité? 2 répondants, 2 réponses.

    Par exemple on peut imaginer que les parents d’un élève fréquentant un programme sport-études préfèrent le sport aux arts. Et l’inverse est probablement vrai: les parents pour qui les arts sont importants ont plus de chances d’inscrire leur enfant dans un programme art-études.

    Par conséquent si on demande aux parents qui trouvent insuffisante l’importance accordée au sport dans le réseau scolaire si leur école est meilleure que le système, il y a de grosses chances qu’ils répondent oui. Et c’est la même chose pour ceux fréquentant un programme art-études. Ou un programme international.

    En somme, offrir différents programmes permet de mieux satisfaire la clientèle et les bénéficiaires considéreront qu’ils sont plus chanceux que la moyenne.

    Et pour les autres, ils devraient statistiquement se partager 50-50. Mais on entend tellement parler des problèmes que leur opinion risque d’être biaisée négativement pour le système en général.

    Pour ces raisons, je ne suis absolument pas surpris que les gens soient plus satisfaits de leur école que du système.

    Mais j’aimerais bien voir une mise à jour de cette étude: novembre 2001, ça veut dire que les résultats datent de plus de 10 ans. Bien avant que la réforme ne touche le secondaire. C’est à peine si le primaire y touchait. Se pourrait-il que les opinions aient changé? Je crois que oui.

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  3. jack permalink
    16 septembre 2010 13 h 00 min

    Deuxième commentaire:

    Il m’apparaît peu utile de comparer le décrochage au Québec actuel au décrochage au Québec il y a 20, 30 ou 40 ans. Si on s’améliore, tant mieux, mais ça ne veut pas dire grand-chose. Si la tendance mondiale est à l’amélioration, il faut comparer notre amélioration à celles des autres.

    Si notre décrochage est 5% inférieur à ce qu’il était il y a 10 ans, tant mieux. Mais si pendant ce temps le décrochage est réduit de 30% dans le reste de l’Amérique, alors je dirai que notre performance est loin d’être glorieuse. Il faut se comparer avec nos voisins.

    Même à cela… il suffit de réduire les exigences, par exemple, pour nous faire bien paraître. Sans être complètement inutiles (loin de là) ces comparaisons ne donnent pas un juste portrait de la réalité.

    Par contre les résultats de tests internationaux comme le PISA m’apparaissent des instrument d’évaluation pertinents, non biaisés et peu manipulables. Les excellents résultats québécois obtenus avant la réforme doivent impérativement être comparés aux résultats qui seront obtenus après la réforme. Pour moi ce sera l’un des meilleurs instruments de mesure de la performance de nos élèves réformés.

    En attendant… les opinions seront fondées sur du vent.

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  4. 16 septembre 2010 17 h 51 min

    @ Minarchiste

    «As-tu vu le documentaire « Les enfants du palmarès »?»

    J’ai lu plusieurs textes sur ce documentaire et ai regardé le début (15-20 minutes). Je trouvais le documentaire trop axé sur quelques cas particuliers. On est loin de la réflexion d’un documentaire comme «Les vrais perdants», qui abordait un thème un peu semblable.

    http://www.onf.ca/film/Vrais_Perdants_Les/

    Même si je n’ai pas vraiment aimé ce documentaire, je ne vous surprendrai pas en disant que je ne partage vraiment pas les commentaires de Jean-Luc Autret.

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  5. 16 septembre 2010 18 h 36 min

    @ Jack

    «Par exemple on peut imaginer que les parents d’un élève fréquentant un programme sport-études préfèrent le sport aux arts.»

    Le premier motif que j’invoque dans mon billet est d’ailleurs : «On peut trouver normal que le personnel des écoles et les parents aient une meilleure perception de l’école qu’ils ont bien souvent choisie que des autres écoles qu’ils n’ont justement pas choisies.»

    «Mais on entend tellement parler des problèmes que leur opinion risque d’être biaisée négativement pour le système en général.»

    C’est mon deuxième argument !

    «Se pourrait-il que les opinions aient changé? Je crois que oui.»

    La réponse au sondage de La Presse («86% des répondants ont affirmé être très satisfaits ou plutôt satisfaits de l’école fréquentée par leur enfant») semble aller dans le sens contraire de votre impression. Le taux de satisfaction est encore plus élevé qu’en 2001. C’est d’ailleurs cela qui m’a incité à écrire ce billet et à ressortir l’étude antérieure, tout de même beaucoup plus complète (+ de répondants, parents et personnel, primaire et secondaire, + de questions, et analyse par des professionnels du domaine).

    «Il faut se comparer avec nos voisins.»
    «il suffit de réduire les exigences, par exemple, pour nous faire bien paraître.»

    Le problème avec ces comparaisons est qu’on ne sait pas si la base de ce qu’on compare (les diplômes d’études secondaires un peu partout au Canada et dans le monde) sont vraiment comparables. Les bons résultats au PISA des jeunes Québécois iraient dans le sens que notre DES est plus exigeant, car nos élèves semblent avoir une meilleure connaissance des questions posées et de meilleures compétences en analyse et en résolution de problèmes, surtout en mathématiques, mais aussi en sciences et en lecture.

    Si vous consultez la page 22 de http://www.statcan.gc.ca/pub/81-595-m/81-595-m2006043-fra.pdf , vous verrez que, 4 ans après avoir participé au PISA, seulement 30 % des jeunes Québécois qui avaient obtenu les pires notes (0 ou 1) au PISA avaient leur DES, tandis que la moyenne canadienne est de 62 % (environ 70 % si on emlève le Québec) ! En plus, le diplôme au Québec s’obtient après 11 ans d’études, tandis que celui des autres provinces s’obtient après 12 ans. Bref, si des provinces semblent niveler par le bas (ou réduire les exigences), ce n’est pas le Québec, mais les autres provinces ! Il en est de même, mais avec moins d’ampleur pour les participants au PISA qui ont obtenu la note 2 : 60 % des jeunes Québécois avaient obtenu leur DES 4 ans après, par rapport à 77 % pour l’ensemble du Canada (plus de 80 % si on enlève le Québec).

    «En attendant… les opinions seront fondées sur du vent.»

    Ces résultats seront en effet éclairants, mais on a quand même plus que du vent. Consultez les résultats du TEIMS (enquête internationale sur la mathématique et les sciences) et du PIRS (programme d’indicateurs du rendement scolaire)… Les résultats sont un peu moins bons qu’avant, mais encore meilleurs que ceux de la France et de la Belgique (autres pays francophones) !

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  6. jack permalink
    16 septembre 2010 22 h 15 min

    @ Darwin:

    J’avoue que je n’apporte que très peu de nouvel éclairage. J’aurais pu aussi écrire que ceux qui trouvent le système québécois pourri risquent d’envoyer leur enfant au privé. Si on ne sonde que les « clients » du public on risque d’obtenir des résultats biaisés. Mais cela n’apporte pas beaucoup non plus.

    Par ailleurs je viens de jeter un coup d’oeil sur les résultats du TEIMS 2007 et j’avoue être très (TRÈS) agréablement surpris (très surpris).

    Si je ne me trompe pas, en 2007, les élèves de secondaire 4 (Oh, excusez-moi… de deuxième année du deuxième cycle) n’étaient pas « réformés ». Mais peut-être que les élèves de secondaire 2 (bien oui… de deuxième année du premier cycle) avaient subi la réforme. Or que voit-on?

    En maths:
    14ème position pour les sec. 4
    6 ème position pour les sec 2 (les réformés)

    En sciences:
    19ème position pour les sec. 4
    15ème position pour les sec. 2

    Alors si je ne me trompe pas sur les années d’application de la réforme, on devrait conclure que dès la première ou deuxième année d’application le Québec aurait gagné des échelons! Je n’ai pas vu cela dans les manchettes des journaux. Mais je me trompe peut-être.

    Décidément, Darwin, vous êtes un trésor d’informations. Je suis heureux, en tant que chercheur de trésor, de vous avoir trouvé.

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  7. 17 septembre 2010 0 h 17 min

    @ Jack

    «Je n’ai pas vu cela dans les manchettes des journaux.»

    C’est exactement ce que j’écrivais dans mon avant-dernier paragraphe. Je crois avoir lu quelque chose sur le lien entre les heures consacrés au jeu, ordinateur et à la télévision et les résultats au TEIMS. Si on en avait parlé, on aurait sûrement mis l’accent sur le tableau de la page 12, où on voit que les élèves québécois font mieux que les autres pays, mais moins bien qu’en 2003, 1999 et 1995, même si la baisse est mondiale et que l’écart relatif avantage encore nettement nos élèves…

    «vous êtes un trésor d’informations»

    Euh… Disons que l’éducation est un domaine qui m’intéresse beaucoup, peut-être parce que j’ai découvert un jour que le discours ambiant dénigre constamment la réalité.

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  8. 17 septembre 2010 6 h 30 min

    Ayant participé discrètement dans un Conseil d’Établissement d’une école secondaire publique, une chose que je peux affirmer c’est que les parents ne s’impliquent pas dans leurs écoles. Du moins, si je me fie à ma propre expérience. Lors des assemblées générales, moins de 1% des parents y sont présents. Soit que les parents ne sont carrément pas intéressés par la gestion de l’école (où ils sont appelés à y prendre part) ou ils font entièrement confiance au directeur, aux professeurs, au personnel de soutien et à quelques parents dévoués pour les représenter.

    J’ai longuement discuté avec des parents lorsqu’est venu le temps de préparer le saut du primaire au secondaire. Deux facteurs ressortaient continuellement: 1) nous voulons ce qu’il y a de mieux pour l’enfant et 2) l’école publique est un endroit incontrôlé où la drogue est omniprésente. Plus je dialoguais avec eux, plus je comprenais que l’école privée était finalement meiux synchronisée avec leurs propres horaires, ce qui leur simplifiait la vie.

    Je trouve dommage que les banlieusards de la région de Montréal se détachent de leurs écoles publiques. Si les parents se réappropriraient ces écoles, nous pourrions créer une certaine solidarité, ce qui serait bénéfique pour la vie citoyenne. Hélas, il faut bien constater que l’individualisme prend le dessus, la tendance semblant se diriger de plus en plus vers, ce que certains appelent, les libertés individuelles…

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  9. 17 septembre 2010 6 h 49 min

    @ Luto

    À l’École secondaire où j’ai participé, la présece à l’assemblée générale était d’autour de 5 %. C’est plus que pour ton expérience, mais cela reste pas fort…

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  10. Sombre Déréliction permalink
    21 septembre 2010 21 h 22 min

    Mon école est meilleure que la tienne, c’est ben normal est privée!

    hahahahahahahahahah! 😆

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