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Jeanne express – L’inflationophobie de la BCE : répercussions dans la zone euro

24 novembre 2013

sans-titreLe fonctionnement de la Banque centrale européenne est régi par de sévères contraintes. Probablement en raison de l’inconfort des Allemands face au moindre signe d’un éventuel épisode d’inflation galopante, la BCE maintient son inflation-cible à 2 %. Cependant, tel que rapporté par Patrick Artus, directeur de la recherche économique à Natixis, cela implique un double-standard : les risques de déflation ne semblent pas être pris aussi sérieusement que les risques d’inflation!

La déflation égorge les emprunteurs, publics et privés

Toujours selon Artus, la déflation ne se manifeste pas qu’au recul des prix :

«Si l’on s’en tient à sa définition stricte, elle se déclenche dès que les taux nominaux se décorrèlent de l’évolution des prix.»

Et c’est précisément ce qui ébranle la gestion des dettes publiques propres à certains pays membres de la zone euro :

«Prenez l’Espagne. Certes, le taux nominal de ses obligations souveraines à dix ans est passé de 6,5 % au plus fort de la crise à 4,1 % aujourd’hui. Mais, dans le même temps, l’inflation est passée de plus de 3,5 % à 0 %. Cela signifie que le taux réel payé par le pays pour placer ses obligations, que l’on calcule en soustrayant le taux d’inflation au taux nominal, est passé de 3 % à 4,1 %. C’est intenable. Et l’on observe le même phénomène en France, en Italie, au Portugal, en Grèce.»

Évidemment, cette augmentation du taux réel payé par les emprunteurs ne touche pas que les obligations souveraines mais bien également la solvabilité des entreprises et des particuliers :

«La déflation détruit la solvabilité des emprunteurs tout en paralysant l’économie entière : les consommateurs repoussent leurs achats, les PME n’investissent plus…»

Laxisme de la BCE face à la déflation

Artus reproche par ailleurs à l’institution européenne d’avoir trop attendu dès la venue des premiers faibles taux d’inflation, les méfaits de la déflation s’étant déjà fait ressentir sur les prix et les salaires :

«[…] désormais les entreprises ont intégré la baisse des prix dans leurs prévisions, et ont commencé à la répercuter dans leurs contrats et sur les salaires. La BCE a fait l’erreur d’attendre que la spirale baissière des prix devienne auto-entretenue.»

Cette situation se nomme également «spirale déflationniste.» Le recul des prix mène à un recul de la production et donc des salaires. En conséquence, la consommation s’en retrouve réduite et cette réduction de la demande ne fait qu’accélérer la diminution des prix. Autrement dit, l’économie devient prisonnière de cette boucle aggravant la déflation.

Dans le même article, Artus suggère le recours à des solutions inusitées, la simple diminution du taux directeur étant selon lui insuffisante. Entre autres, il propose le recours à des politiques monétaires non conventionnelles tel que l’assouplissement quantitatif.

Et alors…

Il y a malheureusement de nombreux obstacles pour que la BCE accepte les solutions préconisées par Artus, Tout d’abord, la cible d’inflation de la BCE de 2 % est nettement insuffisante pour que les pays du Sud de l’Europe puissent se relever rapidement. Ensuite, la BCE se cabre beaucoup plus rapidement quand l’inflation excède cette cible (quand est-ce arrivé la dernière fois?) que quand elle lui est inférieure, soit tout le temps! En effet, dès qu’elle s’approche de cette cible, elle prend des moyens pour la rabaisser, mais elle ne prend aucune mesure expansionniste lorsque’elle lui est inférieure.

Cela montre clairement l’obsession de la BCE pour l’inflation et le fait que ses concepteurs ont omis de lui donner comme mandat de craindre encore plus l’absence de croissance que des niveaux d’inflation acceptables. Et, pendant ce temps, plein d’Européens souffrent…

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