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Ces compressions n’affecteront pas les services à la population

22 février 2014

services à la populationQuand je pense à une nouvelle expression qui me tape sur les nerfs, je me demande souvent comment il se fait que je n’en ai pas parlé avant ça. C’est le cas avec l’expression vedette du jour.

C’est rendu un mantra. À chaque nouvelle annonce de compressions, nos politiciens en chef répètent à satiété que leurs coupures n’auront aucun effet sur les services à la population. C’est évident, non, qu’ils embauchaient auparavant des employés qui n’offraient aucun service à la population!

Quelques exemples et contre-exemples…

Un de mes favoris de ce côté est pour l’instant François Legault qui a le chic d’annoncer les baisses d’impôt auxquelles il procéderait s’il était au pouvoir, à coup de milliards $, rien de moins en annonçant fièrement que nous ne nous en apercevrions même pas! Couper chez Hydro, dans les commissions scolaires, dans la santé, pas de problème, prétend-il, car plein de personnes dans ces secteurs qui n’apportent rien à la population : «Oui, il y a de la place pour couper quelques milliards, sans toucher aux services à la population», a dit M. Legault».

Quand notre nouveau maire Coderre (enfin un maire dont le nom rime avec sa fonction!) annonce qu’il va geler les embauches, sans préciser dans quel secteur, il ne peut s’empêcher, lui qui se targue de son franc parler et de fuir la langue de bois, que dit-il? Il «assure par ailleurs que la pause des embauches « n’affectera pas les services directs à la population ». Le président du comité exécutif, Pierre Desrochers, n’est pas en reste : 64 millions $ à retrancher du budget? «Cette rationalisation devra être réalisée sans réduction de services aux citoyens, a insisté M. Desrochers.»

Évidemment, les syndicats prétendent l’inverse! «Comment peut-on parler d’une compression de 5,2 G$ dans la réduction des dépenses sans que les services à la population ne soient touchés ?», disait la CSN quand le gouvernement Marois visait sans concession le déficit zéro.

Bon quand un syndicat dit ça, on peut toujours prétendre qu’il n’est pas objectif. Mais, comment ne pas se rendre à l’évidence quand la protectrice du citoyen dit la même chose?

«D’année en année, l’écart entre les services annoncés et ceux réellement accessibles continue de se creuser en raison des pressions budgétaires qui se font sentir de façon intensifiée. Avec chaque annonce de compression revient la formule consacrée que les services publics directs à la population ne seront pas touchés ; ce n’est plus vrai.»

Bon, nos professionnels de la compression pourraient toujours prétendre que la protectrice du citoyen est biaisée, son rôle étant justement de protéger le citoyen (tout un biais!). Mais, quel argument peut-on utiliser quand le vérificateur général en dit tout autant?

«Puisque le gouvernement a promis de ne pas hausser les taxes et les impôts, Michel Samson juge que les seules options disponibles sont la hausse des tarifs ou la compression des dépenses et des services.»

Cadre budgétaire du PQ

Je m’attendais à entendre à nouveau la litanie des compressions sans baisse de services dans le discours du ministre des Finances lors du dépôt du cadre budgétaire du PQ pour la prochaine campagne électorale. Mais, ce cadre est tellement imprécis, car «Les crédits gouvernementaux – les sommes allouées à chacun des ministères – n’ont pas été rendus publics avec le budget», qu’on ne sait même pas quels services «seront les plus affectés par les compressions à venir».

Et alors…

On pourrait à la limite comprendre que la population ait pu croire ce genre de banalité grossière lors des premières compressions budgétaires faites par le PQ de René Lévesque au début des années 1980. Mais que, après plus de 30 ans d’annonces du même genre, nos gouvernants répètent sans cesse la même ritournelle – parfois transformée en «faire plus avec moins» ou en recherche de «gains de productivité» (même si cette expression n’a aucun sens, surtout dans le secteur public) – ils pensent encore que la population gobe ça, c’est assez hallucinant. En fait, c’est encore pire. La population ne les croit pas, mais trouve «normal» que nos politiciens nous mentent jour après jour. Et, la résignation est peut-être un symptôme encore plus grave de la dissociation de notre société que le cynisme…

7 commentaires leave one →
  1. Richard Langelier permalink
    22 février 2014 23 h 03 min

    Il y a la formule passe-partout : « Il n’y aura pas de problèmes, ça se passera par attrition. Un fonctionnaire sur deux ne sera pas remplacé ». En plus, on nous promet la lutte à l’évasion fiscale avec moins d’inspecteurs.

    Un « ami » assisté social me disait :
    – Les fonctionnaires devraient faire le même travail en 4 jours au lieur de 5.
    – Tu veux que le bureaux d’Aide sociale soient fermés le vendredi?
    – Ben non!
    – Tu veux attendre une heure au lieu de 30 minutes, lorsque tu vas porter un document?
    – Ben non! Je parle des pousseux de crayons.
    – C’est qui ça?
    – Tout le monde sait ça. Ceux qui travaillent dans des bureaux.

    Est-ce que la population gobe ça ou est résignée? Je n’ai pas fait d’enquête exhaustive. Je suis pessimiste un jour sur deux. Comme les discours « le Québec est dans le rouge », « pour maintenir nos programmes sociaux, il faut exploiter le pétrole », « il y a consensus chez les économistes, il ne faut pas dépasser le seuil psychologique de 50 % comme palier supérieur d’imposition des particuliers (même si les crédits d’impôt sont tellement importants qu’il faut un revenu brut pas mal élevé pour payer 49,75% sur une partie de ses revenus) foisonnent, je devrais être pessimiste deux jours sur trois.

    J’ai de l’espoir parce que des gens s’impliquent pour que le Québec ait meilleure mine, sorte de la dépendance au pétrole, pour dégonfler ce mythe du consensus chez les économistes, etc.

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  2. 23 février 2014 0 h 37 min

    Moi, je travaille dans ce sens, mais l’espoir, ben, il n’est pas fort!

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  3. Yves permalink
    23 février 2014 5 h 24 min

    Cela est tout en ton honneur.
    En tout cas vous n’êtes pas seul à avoir l’espoir dans l’ talon.

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  4. mathieu permalink
    28 février 2014 4 h 21 min

    J’ai lu certain de tes articles et je dois t’avouer que tu m’impressiones. Il ne semble pas avoir de partie pris dans aucun de ceux-ci. Je suis à droite avec  »des tonnes de nuances », et j’aime bien raffiné mes opinions sur de nombreux sujets.

    J’ai particulièrement aimé l’article sur la péréquation.

    Cependant, concernant cet article ci, je ne suis pas d’accord avec ton point et j’aimerais lire ton avis sur mon commentaire.

    Tu es probablement d’accord qu’un service public, n’ayant pas d’incitatif à être efficient, ocasionne beaucoup d’inefficience. Je concède que le but premier d’un service public n’est pas d’être le plus efficient possible, mais pourquoi nous ne tenterions pas de le rendre ainsi ?

    Je m’explique. J’ai travaillé dans le passé pour 3 différents employeurs, dont 2 étaient directement gouvernemental, et un était une firme embauché par hydro-québec. Je vais toujours me rappelé de ces emplois pour les immenses pertes de temps, cautionné ou je dirais plutot encouragé par les superviseurs/boss. Certaines de ces pertes de temps étaient simplement de l’abus, d’autre étaient causé par une mauvaise gestion.
    Dans tous ces emplois, je voix de nombreuses  »coupures » à faire qui ne réduirait pas le services aux citoyens.

    Et finalement, je suis d’accord que le gouvernement dois offrir certains service essentiels aux citoyens, mais quel est le rapport avec hydro-qc ?

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  5. 28 février 2014 6 h 21 min

    Merci pour les bons mots, malgré nos écarts de valeur manifestes.

    «Tu es probablement d’accord qu’un service public, n’ayant pas d’incitatif à être efficient, ocasionne beaucoup d’inefficience.»

    Non, j’ai connu des lieux de travail publics très efficaces avec des gens travaillants (passez-vous des fois dans des écoles ou dans des hôpitaux?) et des lieux privés très inefficaces. Avec les révélations de la Commission Charbonneau, êtes-vous certain que les firmes privées d’ingénieurs sont plus efficaces et efficientes qu’Hydro-Québec? Il y a selon moi une perte dès qu’on parle de grosses entreprises, mais, encore là, il ne faut pas généraliser.

    Finalement, les incitatifs ont un rôle, mais ce n’est pas le seul facteur. En plus, les incitatifs ne sont pas seulement monétaires. La plupart des études sur le sujet concluent que les incitatifs monétaires ne jouent qu’à court terme, mais que la valorisation et la gratification qu’on ressent et reçoit d’un travail ont un rôle plus important et durable. Il est par ailleurs douteux que ce soit plus gratifiant de travailler pour faire enrichir des actionnaires anonymes et un pdg au salaire indécent que pour faire bénéficier à l’ensemmble de la société de son travail. Finalement, la dernière crise financière nous a bien montré à quel point les incitatifs monétaires peuvent avoir des effets négatifs (et pas seulememnt dans le secteur financier).

    Ce billet écrit il y a quelque temps aborde aussi cette question :

    Biens publics et privés, et rôles de l’État et du secteur privé

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  6. 24 avril 2014 18 h 27 min

    Et, ça continue!

    «Les dépenses administratives seront aussi diminuées de 3 %, sans atteinte aux services à la population» et
    «Concernant le gel d’embauche, celui-ci s’appliquera à la fonction publique, aux sociétés d’État et aux réseaux dans les postes qui ne touchent pas les services à la population. »

    http://www.ledevoir.com/politique/quebec/406419/gel-des-embauches-dans-la-fonction-publique

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